14 juin 2021 - La Via Francigena de Lentilles à Chalette-sur-Voire

Après avoir profité du week-end pour reprendre quelques forces et avoir établi mon camp de base dans un superbe ancien moulin à eau à Trannes, dans l'Aube, me voici de retour sur la Via Francigena.

Mais, pour les cinq étapes au programme de cette semaine, je ne serai plus seul ! En effet, mon fils cadet Kévin et sa compagne Aurélie m'ont rejoint ce dimanche.

À cause de la pandémie de COVID-19, je n'avais plus vu mon fils depuis que nous avions marché ensemble sur la Via Francigena en septembre 2020. Quant à ma belle-fille, c'est simple, je n'avais pas encore eu l'occasion de la rencontrer ! C'est dire si leur présence me réjouit !

Mais trêve de sentimentalisme, lever à 6h30 - ouille, là je n'ai pas la moindre pitié pour les vacanciers ! - pour pouvoir débuter la randonnée au plus tôt. En effet, les conditions météo n'ont pas changé et il va de nouveau faire très chaud !

Au programme du jour, une vingtaine de kilomètres entre Lentilles et Chalette-sur-Voire. De beaux dénivelés, mais peu de bois, hélas.

Nous commençons la randonnée par la visite de la magnifique église à pans de bois de Lentilles. Dédiée à Saint-Jacques et à Saint-Philippe, elle date de 1512 et est considérée comme la plus typique des églises à pans de bois de Champagne.

Les fenêtres circulaires surmontant les baies vitrées du chœur sont un élément qu'on ne retrouve dans aucune autre église à pans de bois.

Nous quittons Lentilles en direction de Villeret par la D 2. Mille-deux-cent mètres sur une route asphaltée heureusement peu fréquentée.

Nous empruntons alors un chemin de terre, à droite, courant entre le Tourne-Queue de Lentilles et les Planches de Villeret.

Sur notre trajet, nous croisons la ligne de chemin de fer Vitry-le-François - Brienne-le-Château, celle-là même dont je vous avais parlé dans mon récit du 10 juin dernier.

Du chemin de fer, ce sont deux kilomètres à travers les campagnes de Villeret qui nous amènent à Montmorency-Beaufort.

Avec le relief en arrière-plan, le paysage est plutôt sympathique.

Montmorency-Beaufort. Ce petit village de moins de cent-cinquante habitants, sis sur la limite entre la Champagne humide et la Champagne crayeuse, à l'histoire riche et mouvementée, ne dit sans doute pas grand-chose à la plupart d'entre nous.

Les fans de d'Artagnan et des trois mousquetaires se souviendront pourtant du Duc de Beaufort. Beaufort était en effet le nom du village au Moyen-Âge et à la Renaissance. Les derniers Plantagenêts portèrent ainsi le titre de Duc de Beaufort.

Au XIVè siècle, Beaufort possédait un château-fort puissamment fortifié et réputé imprenable, jusqu'à ce qu'en 1369 Charles V réussisse à s'en emparer grâce à une trahison. On ne trouve plus trace de ce château à l'heure actuelle.

Début 1768, devenu duché de Montmorency, Beaufort prend alors le nom de Montmorency. Et c'est en 1919 qu'il change à nouveau de nom, en Montmorency-Beaufort tel que nous le connaissons aujourd'hui.

Voilà un très court récit de l'histoire de Montmorency-Beaufort, à l'image de notre passage.

Nous quittons en effet rapidement le village pour rejoindre, par un chemin escarpé, le sommet de la colline qui le domine.

Sur le sommet, trône un château d'eau (à droite du chemin sur la photo ci-dessous, on voit un morceau de la clôture qui l'entoure). Ce serait à cet endroit, selon les historiens, que se situait l'ancien château de Beaufort.

La vue qui nous est offerte d'ici nous fait réaliser combien la position du château était stratégique.

Nous rejoignons alors la ligne de crête que nous suivons pendant plus de trois kilomètres. D'ici, nous dominons toute la région !

Nous descendons de notre balcon au lieu-dit le Temple pour rejoindre la D 193 en direction de Rosnay-l'Hôpital.

À midi tapant, nous sommes à l'entrée du chemin qui mène à la ferme de Presles. Chemin bordé d'arbres qui tombent à point pour nous permettre de manger notre casse-croûte à l'ombre. Face au Mont Aigu et sous la protection de Saint-Georges.

Un répit qui nous fera du bien après ces deux heures passées en plein soleil.

Repus et quelque peu reposés, nous repartons en direction de Rosnay-l'Hôpital. D'abord en empruntant la D 193 sur six-cents mètres, avant de bifurquer à gauche sur un beau chemin de campagne.

Nous entrons dans Rosnay-l'Hôpital par l'est et nous sommes surpris d'y découvrir une tour d'un ancien château-fort. Bon, elle est en tellement bon état que nous pensons d'abord à un élément d'un parc d'attractions.

Et même si, du XIVè au XVIIè siècle, il y eut effectivement ici un château-fort entouré de douves, un doute subsiste toujours dans mon esprit sur l'authenticité de cette tour.

Elle, par contre, est authentique. Elle, c'est l'imposante église de l'Assomption-de-la-Vierge dont la particularité est d'être construite sur deux niveaux.

Bien que déjà citée en 1035, la partie basse date du XIIè siècle et semble être dédiée à Thomas de Canterbury, archevêque de Canterbury, sans doute mieux connu sous le nom de Thomas Becket. Ce n'est pas anecdotique puisque nous marchons justement sur les traces de Sigeric, un de ses prédécesseurs !

Même si elle a des éléments datant du XIIè et du XVè siècle, la partie haute date, elle, majoritairement du XVIè siècle.

L'église est classée au titre des monuments historiques depuis 1846.

Et à proximité de l'église, coule la Voire...

Nous laissons l'église derrière nous en empruntant la superbe ruelle des Marronniers. Au carrefour avec la D 396, nous découvrons un surprenant monument aux morts. Il n'est en effet pas courant de voir un tel monument ainsi coloré.

Il s'agit en fait d'un exemplaire du Poilu victorieux du sculpteur Eugène Bénet. Réalisée en fonte, tirée depuis 1920 à environ neuf-cents exemplaires, il s'agirait de l'œuvre d'art public la plus répandue en France. Comme ici, elles ont parfois été peintes.

Tiens, si vous avez été attentif, vous aurez vu la mention 1914 - 1919 sur le monument. 1919 ? La Première Guerre Mondiale ne s'est-elle pas terminée à l'armistice du 11 novembre 1918 ?

Eh bien non. L'armistice n'était qu'un arrêt temporaire des hostilités. En France, la Première Guerre Mondiale ne se terminera officiellement que le 28 juin 1919 à la signature à Versailles des traités de paix avec l'Allemagne.

Nous quittons Rosnay-l'Hôpital par la D 396, direction Lassicourt. Mais au bout de cinq-cents mètres, alors que la Départementale s'en va résolument vers la gauche, nous nous engageons tout droit dans un chemin de campagne, à l'assaut du Côté Denis. Et nous voilà reparti vers les sommets !

De là-haut, regardant vers la sud, nous pouvons observer la plaine de la Voire et aussi l'aérodrome de Brienne-le-Château dont les toits de certains hangars brillent au soleil.

Inauguré le 27 juillet 1913, il sert d'aérodrome de desserrement pour l'OTAN de 1953 à 1965. Le desserrement consiste à redéployer des moyens sur un site éloigné de leurs bases-mères. Il pouvait accueillir une cinquantaine d'avions de chasse.

Géré par le Conseil Général de l'Aube, il est ouvert à la circulation aérienne publique. Depuis 2014 on y tourne aussi l'émission Top Gear France diffusée sur RMC Découverte et, en Belgique, sur RTL Club.

Tout en suivant la ligne de crête, nous descendons vers Bétignicourt...

Nous découvrons Bétignicourt, un micro-village d'une trentaine d'habitants situé sur les bords de la Voire. Tiens, comment appelleriez-vous les habitants de Bétignicourt ? Des Bétignicourtins ? Bétignicourtois ? Eh bien, non ! Ce sont des Babeuriers ! Ne me demandez pas pourquoi, je n'en ai aucune idée...

L'église Saint-Ferréol date du XVIIIè siècle.

Et pour la troisième et dernière fois, nous remontons sur la colline dominant la Voire et sa plaine.

De la ligne de crête, nous bénéficions d'une belle vue sur Bétignicourt, la plaine de la Voire et au-delà, au sud, et jusque... très très loin au nord.

Nous ne sommes pas victimes d'hallucinations, c'est bien un immense champ de pavots que nous découvrons au Grand Champ, à Chalette-sur-Voire.

Redescendus au niveau de la Voire...

Nous faisons connaissance avec Chalette-sur-Voire et son ambiance Far-West ! Non ? Vous ne trouvez pas ?

Nous terminons la randonnée au carrefour formé par la rue du Marais et la rue Suzanne Dalhem. Ici, la Via Francigena part vers l'est et ne traverse donc pas le village.

L'église de l'Assomption datant des XIIè et XVIè siècles ne se trouve ainsi pas sur le trajet de la Via Francigena mais nous décidons quand même de lui rendre une petite visite.

De beaux chemins de campagne, quelques rares passages asphaltés néanmoins parfois un peu longs, des villages et monuments dignes d'intérêt, voilà qui concourrait à faire de cette étape une belle randonnée.

Mais la plus grande partie du trajet se passant à travers champs sur la ligne de crête surmontant la Voire, les paysages ne sont guère variés. C'est même un euphémisme. D'un côté, la plaine de la Voire, de l'autre, des champs à l'infini. Bref, au fil des kilomètres, ça pourrait devenir lassant s'il n'y avait ces villages comme intermèdes.

Si vous souhaitez faire cette étape de la Via Francigena, vous trouverez ci-dessous la trace GPX :