11 Juin 2021
Aujourd'hui est mon dernier jour de randonnée de la semaine, avant un petit repos bien mérité, ce week-end.
Mais c'est aussi mon 25ème jour de randonnée sur la Via Francigena depuis mon départ de Calais. Ce soir, j'aurai ainsi franchi la barre des 600 kilomètres parcourus, soit une moyenne de 24 kilomètres par jour.
Bon, n'y voyez là aucun exploit. J'ai commencé mon périple le 29 juillet 2019 et, jusqu'ici, j'aurai marché maximum cinq jours d'affilée. Pas de quoi figurer dans le Guinness Book of Records.
25, c'est aussi le nombre de kilomètres à parcourir aujourd'hui pour rejoindre Lentilles. Une étape qui s'annonce aussi éreintante que les précédentes vu les températures élevées encore annoncées.
J'avais justement fixé rendez-vous à 9 heures à la Mairie de Lentilles avec Christine - adjointe au maire de Saint-Remy-en-Bouzemont comme je l'apprendrai ultérieurement - pour ne pas commencer mon étape trop tard. Et, à l'heure dite, ce n'est pas Christine, mais Christine et Alain qui se présentent pour m'emmener ! Ça c'est de la prise en charge !
J'aurais donc pu démarrer vers 9 heures 25 mais voilà que Sylvian, pardon, Monsieur le Maire, vient se joindre à nous et que, forcément, le dialogue s'installe. Il est finalement presque 9 heures 40 quand je me mets en route.
Les premiers cinq-cents mètres se déroulent sur la D 58, direction Drosnay. Nous passons alors sur deux cours d'eau, le Pars et l'Isson, entre lesquels débute le chemin d'accès au château de la Motte, son musée de la vigne et du vin de Champagne, et sa roseraie présentant plus de 700 variétés de roses ! N'ouvrant qu'à 10 heures 30, je n'aurai pas l'occasion d'aller y jeter un œil mais il n'est pas exclu que j'y revienne.
Ensuite nous prenons à gauche pour rejoindre les campagnes au sud-est du village.
Sur le Mont Tibé, qui n'a rien d'un mont mais tout d'une colline, j'ai la chance de rencontrer Christophe, un très sympathique agriculteur au physique de professeur des écoles originaire du village. Nous passons un long moment à discuter et, chose intéressante parmi toutes les autres, il me donne plus de précisions sur la venue des grues dont Christine et Alain m'avaient parlé.
En effet, chaque année, entre 200 et 300.000 grues font escale, sur leur route migratoire, aux alentours du lac du Der situé à quelques kilomètres d'ici. Particulièrement à la fin de l'hiver, elles se lancent alors à la recherche de nourriture et viennent dévaster les champs récemment semés.
Pour lutter contre ce fléau tout en protégeant les volatiles, la LPO Champagne Ardenne a créé en 1990 la Ferme aux Grues, sise en contrebas, au nord-ouest du Mont Tibé.
De la nourriture y est ainsi distribuée pour éviter que les grues s'en prennent aux champs et un observatoire accessible gratuitement permet d'observer les animaux sans les effrayer. Période idéale d'observation : entre le 15 février et le 5 mars.
Après avoir discuté plus d'une demi-heure avec Christophe en plein soleil, je décide quand même de poursuivre mon chemin sur le Mont Tibé pour rejoindre le Bois des Usages où j'espère bien pouvoir retrouver un peu de fraîcheur.
Malheureusement, sur les deux kilomètres et demi de traversée du bois, les réelles occasions de marcher à l'ombre sont relativement peu nombreuses et en tout cas, côté température, champs ou bois, c'est chou vert et vert chou.
À la sortie du bois, le chemin descend vers l'étang de Pichot pour remonter ensuite jusqu'à la ferme des Hautes Landres.
À la ferme, isolée au milieu de nulle part, l'atmosphère est assez glauque avec les carcasses de voiture et de wagons-citernes. Je ne m'y attarde pas.
De la ferme au Bois des Menonvilles, le chemin longe une prairie, sur le côté gauche. C'est assez surprenant quand, depuis des jours, on n'a vu que des champs.
Alors que depuis le début nous marchions sur un beau chemin, celui-ci commence à se dégrader. La terre séchée, marquée par le passage de véhicules, est irrégulière. Attention aux chevilles.
En lisière du Bois des Menonvilles, tout se complique. Le chemin a complètement disparu, envahi par les herbes hautes ! Pour couronner le tout, il est parcouru de nombreuses ornières dont certaines sont remplies d'eau. Quelle énergie dépensée sur près d'un kilomètre !
Mais surtout, je me demande comment vont réagir les participants aux commémorations de l'anniversaire des 20 ans de la Via Francigena qui passeront par ici le 8 juillet prochain. C'est en tout cas indigne d'un GR !
J'aurai plus tard l'occasion d'en parler avec le maire de Saint-Remy-en-Bouzemont. Il est au courant de cette situation mais ce passage est de la responsabilité du maire d'Outines qui refuse d'intervenir.
Je comprends en tout cas pourquoi l'endroit, à la fin de ce passage "délicat", s'appelle la Croix l'Homme Mort...
Et si vous avez survécu à tout ça, un kilomètre plus loin, vous pouvez faire une prière à Saint-Pierre !
De la Pierre jusqu'à l'entrée d'Outines, c'est un beau chemin de campagne qui accueille nos pas.
Outines est un très joli petit village de moins de cent-cinquante habitants avec encore de nombreuses maisons à pans de bois et torchis.
Ce type d'architecture, typique de la Champagne humide, est dû au manque de pierres destinées à la construction. Pour son caractère exceptionnel, le village est protégé depuis le 7 février 1970.
L'église Saint-Nicolas, à pans de bois elle aussi, est la plus vaste de ce style dans la Marne et le pays du Der.
Classée monument historique depuis le 7 juillet 1964, sa construction remonte à la fin du XVIè, début du XVIIè siècle. Plusieurs objets, à l'intérieur, sont également classés monument historique.
Un vrai petit bijou à voir absolument !
Sortant d'Outines, ce sont quatre kilomètres et demi à travers champs qui nous attendent avant de rejoindre Bailly-le-Franc. En commençant par la Côte des Landres.
Nous sommes à mi-parcours.
Puis nous tournons autour de la Tartelette où, à ma grande stupeur, le chemin a disparu sous les herbes fauchées. Je me suis même demandé si l'itinéraire de la Via Francigena n'avait pas été modifié à mon insu mais des panneaux indicateurs m'ont vite rassuré.
Après la traversée du ruisseau du Pré Darras, nous abordons la Côte des Haies. À mi-côte, nous pénétrons sur le territoire de Bailly-le-Franc et nous changeons donc de département pour nous retrouver dans l'Aube.
Au sommet, une cinquantaine de mètres sur la gauche du chemin, se trouve une curiosité administrative. Nous sommes en effet là à l'intersection de trois départements : la Marne que nous venons de quitter, l'Aube dans laquelle nous arrivons, et la Haute-Marne que nous rejoindrons dans quelques jours.
Il reste alors un kilomètre et demi pour atteindre Bailly-le-Franc.
Bailly-le-Franc possède aussi une superbe église à pans de bois et torchis !
L'église de l'Exaltation-de-la-Sainte-Croix, construite au XVIè siècle, est classée monument historique depuis le 7 mai 1926.
Nous quittons Bailly-le-Franc par la D 56 en direction de Chavanges. Deux kilomètres et demi de bitume ! Heureusement, en réfection, la route est actuellement interdite à la circulation automobile. Malheureusement, comme l'asphalte vient d'être posé, il faudra supporter son odeur caractéristique.
De plus, bien que nous traversions le Bois de Bailly, la distance entre les arbres et la route ne permet de bénéficier d'un peu d'ombre qu'en de rares occasions.
Avant de sortir du bois, nous pouvons enfin quitter la Départementale par la droite, au lieu-dit La Louvière.
Nous nous retrouvons alors rapidement dans les campagnes, aux Grands Lendriers. Vous apercevrez peut-être, au loin vers le nord, l'église Saint-Pierre-ès-Liens de Joncreuil.
Au bout de trois kilomètres et demi à travers champs, nous retrouvons la D 56. Un panneau indicateur de la Via Francigena montre le chemin à... NE PAS suivre ! En effet, celui-ci donne la direction du village de Chavranges alors que, vérifications faites, ni le GR ni la Via Francigena n'y passe !
Il faut plutôt quitter le D 56 pour emprunter un chemin de campagne se dirigeant plein sud vers Lentilles. Il reste trois kilomètres jusqu'à l'arrivée de l'étape.
Il aura encore fait si chaud aujourd'hui que, deux kilomètres avant la fin, j'ai épuisé toute ma réserve d'eau ! C'est bien la première fois que ça m'arrive.
Arrivé à Lentilles, je n'ai qu'une hâte, trouver de quoi me désaltérer. Heureusement, une dame très sympathique, par ailleurs adjointe au maire et voisine de la Mairie, m'offrira une grande bouteille d'eau. Son mari, tout aussi accueillant, m'invitera à visiter son immense et prolifique potager.
Du coup, je vous parlerai de la superbe église Saint-Philippe-et-Saint-Jacques à pans de bois dans le récit de la prochaine étape.
Si nous faisons abstraction de la chaleur étouffante qui aura encore régné sur la région, cette étape saura susciter l'intérêt grâce aux petits villages traversés, à leur architecture particulière de la Marne et à leurs magnifiques églises en pans de bois.
En cette période de l'année, les campagnes sont très belles mais les longues lignes droites qui les traversent risquent, la fatigue venant, de lasser.
Enfin, il y a ce passage en lisière du Bois des Menonvilles absolument indigne d'un GR et les deux kilomètres et demi dans le Bois de Bailly qu'on préférerait éviter.
Si vous souhaitez faire cette étape de la Via Francigena, vous trouverez ci-dessous la trace GPX :