06 septembre 2022 - La Via Francigena du col du Grand Saint-Bernard à La Clusaz

Et voilà, encore 500 mètres en territoire suisse avant de quitter ce superbe pays pour l'Italie ! Plus précisément le Val d'Aoste - Vallée d'Aoste est toutefois le nom officiel - pour les cinq prochaines étapes.

Cela doit faire entre quarante et cinquante ans que je n'ai plus mis les pieds dans le Val d'Aoste, quand gamin j'y venais en vacances avec mes parents, et je n'ai plus aucune idée de ce que je vais y découvrir.

Je quitte aussi l'hospice du Grand-Saint-Bernard pour établir mes quartiers chez Stefania, à Châtillon. Cette ville n'est pas vraiment située au milieu du parcours des quatre dernières étapes de mon périple actuel mais le Val d'Aoste est bien desservi en transports en commun. Je n'aurai donc a priori aucune peine pour m'y déplacer sans utiliser la voiture.

Sauf aujourd'hui où c'est plutôt compliqué ! Je vous explique ça en fin d'article.

L'étape du jour m'emmène donc du col du Grand Saint-Bernard à La Clusaz, soit un peu plus de 17 kilomètres. Quasi que de la descente puisque nous allons perdre 1.348 mètres d'altitude et seulement en gagner 75 !

Ne vous réjouissez pas trop, c'est souvent plus difficile et fatiguant de descendre que de monter !

Encore un détail avant de vous lancer sur le parcours. Si le balisage en France correspondait au GR 145, s'il fallait suivre le numéro 70 en Suisse, en Italie, il semblerait qu'il n'y ait pas de balisage homogène.

Toutefois, dans le Val d'Aoste au moins, il faut suivre le numéro 103, régulièrement accompagné d'une figurine de Sigéric. Mais on peut aussi trouver, plus rarement, un balisage rouge et blanc comme vous pouvez le voir sur les photos ci-dessous.

Nous avons à peine quitté l'hospice du Grand Saint-Bernard que nous sommes déjà confrontés à un choix.

Si l'application Via Francigena indique de suivre la route qui longe le lac du Grand Saint-Bernard, le balisage semble plutôt nous diriger vers le chemin qui emprunte une corniche surplombant cette route.

Je vous conseille de faire comme moi, prendre de la hauteur. La perspective que nous obtenons sur le lac et ses alentours est tout simplement somptueuse !

À la fin de la corniche, j'ai éprouvé quelques difficultés à trouver mon chemin, malgré le GPS. En fait, il suffit de se diriger vers le plan Jupiter où se dresse la statue de Bernard de Menthon.

Bon, là c'est l'Histoire qui se complique un peu parce que, en fait, Bernard ne serait pas issu de la famille de Menthon. Soit, appelons-le alors Saint-Bernard pour faire simple.

Et le plan Jupiter ? D'après la légende, il se serait ici trouvé une statue de Jupiter (n'oublions pas que la région fut aux mains des Romains) que Saint-Bernard abat avec son écharpe transformée en chaîne lorsqu'il vient vers 1050 sécuriser le col et y faire construire l'hospice.

Sur la colonne soutenant la statue de Saint-Bernard, érigée en 1905, on peut observer une plaque commémorant la visite du pape Pie XI en 1923. À cette occasion, Pie XI le déclare patron des alpinistes, des voyageurs et habitants des Alpes.

Voilà pour l'Histoire. Il est temps de se remettre en route.

À la statue, on retrouve le balisage de la Via Francigena qui nous emmène vers le sud-ouest par un petit défilé. À son débouché, le paysage est à couper le souffle ! C'est beaucoup plus impressionnant que du côté suisse !

Après avoir traversé la route du Grand Saint-Bernard, le chemin décrit un arc de cercle au milieu d'un cirque montagneux comme pour nous faire admirer plus facilement le paysage qui nous entoure.

L'étape commence très fort. C'est de toute beauté !

Continuant notre descente, nous passons à proximité de La Cantine, un ensemble de petits bâtiments.

Il s'agissait autrefois d'un petit hospice fondé en 1258 par Nicolas Richard d'Etroubles sous le nom de Fonteinte. Il accueille les voyageurs et pèlerins jusqu'en 1791.

Tombé en ruines, on y bâtit au XIXè siècle une auberge dénommée La Cantine. La chapelle attenante, érigée au XIIIè siècle, a retrouvé sa fonction première et est dédiée à Notre-Dame des Neiges.

Et nous descendons toujours dans un décor somptueux. On aperçoit bientôt la sortie du tunnel du Grand Saint-Bernard dans le creux de la vallée.

Long de 5.798 mètres, il fut ouvert au trafic le 19 mars 1964 après six années de travaux. Il est géré pour moitié par les Italiens, pour l'autre moitié par les Suisses.

À peu près au-dessus de la sortie du tunnel, une plaque commémorative m'interpelle. Comme je ne maîtrise pas du tout l'italien, je fais appel à mon ami G.

Apparemment, des gitans seraient morts ici lors d'une tempête de neige et on nous demande de prier pour eux. Aucune date n'est toutefois mentionnée...

Cinq kilomètres et demi de descente entre le départ et la route du Grand Saint-Bernard que nous retrouvons, et nous sommes passés de 2.486 mètres d'altitude à 1.712 mètres.

Cela représente un pourcentage de pente moyen de plus ou moins 14% ! M'étonne pas que mes orteils crient au secours !

Bon, vous avez vu comme la végétation s'est densifiée au fur et à mesure de la descente ?

Le premier village traversé lors de cette étape est Saint-Rhémy, une des deux localités qui, avec Bosses, forme la commune de Saint-Rhémy-en-Bosses.

Saint-Rhémy était ce qu'on appelle une mansio, c'est-à-dire qu'elle avait pour fonction d'entretenir et de contrôler la route. Celle du Grand Saint-Bernard, en l'occurrence.

On y trouvait des auberges où il était possible de se restaurer et de changer les chevaux, avant ou après avoir franchi le col.

Après Saint-Rhémy, je retrouve mes amis suisses-allemands. L'étape d'hier a toutefois laissé des traces sur les organismes, ils ne sont plus que trois à avoir poursuivi leur périple à pied.

Nous décidons de casser la croûte ensemble. La ration de voyage reçue à l'hospice est des plus simples : trois tranches de pain, un saucisson et une tranche de fromage. Je n'avais pourtant pas signé pour une vie monacale !

Sinon, la nuit à l'hospice fut reposante. Mes compagnons de chambre ont été très discrets et la literie est d'excellente qualité. Voilà une expérience que je ne regrette pas.

Bosses est donc la deuxième entité qui constitue Saint-Rhémy-en-Bosses et c'est une charmante localité.

L'église Saint-Léonard est une des premières de style néogothique en Val d'Aoste.

Construite entre 1860 et 1861 sur l'emplacement d'une chapelle du XIVè siècle déjà dédiée à Saint-Léonard, elle est restée un lieu de pèlerinage. Saint-Léonard avait en effet pour réputation de guérir les paralytiques et les estropiés.

Le château voisin, à l'architecture simple, daterait du XIVè-XVè siècle.

Nous quittons Bosses pour descendre au hameau de Cerisey situé au confluent du torrent du Grand Saint-Bernard et du torrent Artanavaz.

Nous y laissons en fait la vallée du premier pour nous engager dans celle du second.

De Cerisay à Saint-Oyen, nous bénéficions d'un kilomètre et demi de plat. Exceptionnel jusqu'ici dans cette étape !

Saint-Oyen prit son essor au XIè siècle grâce à l'ouverture de l'hospice du Grand Saint-Bernard.

L'église paroissiale actuelle, assez sobre, érigée en 1820 et agrandie en 1933, est d'ailleurs gérée par les chanoines de Saint-Bernard, comme l'hospice.

De Saint-Oyen à Etroubles, la Via Francigena suit la route du Grand Saint-Bernard en surplomb. Malgré le trafic automobile, on apprécie le paysage.

À Etroubles, un des plus beaux villages d'Italie, nous aurons parcouru 13 kilomètres sur la Via Francigena depuis le col. Par la route, nous en sommes à 16 kilomètres, soit exactement à mi-chemin avec Aoste.

Puisque nous ne sommes pas seulement sur les traces de Sigéric mais aussi sur celles de Napoléon, on sait que ce dernier s'arrêta à Etroubles le 20 mai 1800 avant d'aller livrer bataille à Marengo.

Je profite de mon passage à proximité de l'Office du Tourisme pour y faire tamponner ma credencial...

À l'instar de mes amis suisses-allemands, beaucoup de pèlerins ou de voyageurs sur la Via Francigena feront étape à Etroubles où il est sans doute plus facile de trouver un logement. Pour ma part, j'ai choisi de continuer jusqu'à La Clusaz et je vous explique pourquoi en fin d'article.

Après avoir traversé le torrent Artanavaz sur un joli pont et la route du Grand Saint-Bernard, on retrouve jusqu'à Echevennoz superiore un chemin qui propose de belles vues sur la vallée en aval.

À la sortie d'Echevennoz superiore, on découvre le Rû Neuf. Un rû est le nom donné dans le Val d'Aoste à un canal qui récupère l'eau d'un torrent d'une vallée latérale pour l'amener vers les zones arides de la vallée centrale.

Le Rû Neuf existe depuis le 5 août 1327 comme en atteste un acte notarié qui prévoit même les amendes infligées à ceux qui voleraient l'eau, soit de jour, soit de nuit !

Le trajet suivi par le Rû Neuf est absolument exquis et on se régale à entendre l'eau chanter !

À La Clusaz, je quitte le Rû Neuf pour descendre attendre le bus TMR au bord de la route du Grand Saint-Bernard.

L'hôtel-restaurant actuel était auparavant un des plus anciens hospices du Val d'Aoste. Mentionné pour la première fois en 1234, il accueillait les voyageurs le long de la Voie Romée. Une lanterne ou une clochette en marquait la présence.

Fin d'une superbe étape !

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Si vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D, c'est ici :

Appréciation du parcours :

Cette première étape en Italie est une superbe entrée en matière ! La montagne nous offre différents visages tous aussi somptueux, les villages traversés ont énormément de charme et les chemins empruntés se révèlent très agréables, que demander de plus ?

Pourvu que ça dure, comme disait l'autre...

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Comment rejoindre cette étape ?

Démarrer l'étape de l'hospice du Grand Saint-Bernard, quand on y est, est on ne peut plus simple. Mais quand comme moi on est seul et motorisé, comment récupérer sa voiture en fin d'étape ?

Jusque voici deux ou trois ans, la compagnie suisse TMR et l'italienne Arriva assuraient chaque jour la liaison entre Aoste et Bourg-Saint-Pierre. Actuellement (09/2022), seule TMR le fait encore, mais uniquement le mardi et le vendredi. Voilà pourquoi je n'étais pas pressé d'arriver au col.

Donc, qu'ai-je été obligé de faire ? De l'hospice, je suis descendu en voiture jusqu'à la Mairie de Bourg-Saint-Pierre et je suis remonté en bus TMR. J'ai marché jusque La Clusaz où j'ai repris un bus TMR qui m'a ramené à la Mairie de Bourg-Saint-Pierre.

Attention ! À La Clusaz, le bus ne s'arrête que si vous lui faites signe ! Je le dis parce que j'ai failli le louper si je n'avais levé le bras à la dernière minute.

Quoiqu'il en soit, si vous êtes dans la même situation que moi, renseignez-vous. C'est-à-dire qu'il ne suffit pas de consulter le site Internet des sociétés de transport parce qu'ils ne sont pas à jour. Encore moins les horaires affichés aux arrêts ! Même en Suisse, si, si ! Téléphonez leur pour avoir confirmation des horaires.

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Vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi.

!!! Attention, nous sommes en montagne et le GPS peut perdre en précision. C'est pourquoi vous constaterez sans doute que la trace GPX ne correspond pas toujours avec le tracé des chemins sur la carte.

Soyez prudents si vous effectuez le parcours. Ne vous aventurez pas là où vous auriez un doute et suivez toujours le balisage du sentier !!!