07 septembre 2022 - La Via Francigena de La Clusaz à Nus

Deuxième journée de randonnée dans le Val d'Aoste. Après l'émerveillement d'hier, j'espère un parcours plein de belles surprises même si je sais que la traversée d'une grande ville comme Aoste offre rarement le meilleur.

C'est donc une étape de 27 kilomètres qui m'attend aujourd'hui entre La Clusaz et Nus avec un profil assez particulier comme vous pouvez le voir ci-dessous.

Le ciel est couvert quand j'arrive sur mon lieu de départ, à La Clusaz. Cela devrait toutefois se dégager rapidement.

Je retrouve rapidement le superbe chemin quitté hier, bordé par le Ru Neuf, ce canal artificiel datant du Moyen Âge qui amène l'eau dans les parties les plus arides de la vallée.

Et presque aussitôt, je rencontre Richard, alias Rick, 70 ans, juriste dans l'état américain de l'Idaho. Il a traversé l'Atlantique pour venir parcourir la Via Francigena de Lausanne à Ivrea.

Alors que nous devisons, Rick et moi, le Ru Neuf a disparu sous terre.

Mais en échange, peu avant le torrent Val Buthier, nous faisons la connaissance de trois dames. Deux américaines : Sarah, 60 ans, de l'Oregon, et Tracy, 30 ans, de l'Etat de Washington. Ces deux-là se connaissaient déjà avant de venir sur la Via Francigena puisqu'elles randonnent ensemble dans l'ouest des États-Unis.

La troisième, c'est Lynn, une australienne.

Toutes les trois, comme Rick, sont venues parcourir la Via Francigena de Lausanne à Ivrea. Cette portion, probablement la plus belle, a décidément beaucoup de succès.

Ensemble, nous découvrons la grotte du "Je te salue".

C'est le consortium du Ru Neuf qui suggéra au curé de placer une statue de la Vierge dans cette grotte naturelle bordant le Ru Neuf. Le curé ne se fit pas prier pour organiser ici une halte spirituelle pour les pèlerins et randonneurs.

La statue représentant Jésus adolescent avec sa mère Marie indiquant la route fut bénie le 14 août 2005.

Après la grotte, le Ru Neuf refait surface. Le chemin est un véritable enchantement.

Au bout de 3.700 mètres, il débouche du bois sur un panorama grandiose ! Sur un promontoire, à mi-pente, apparaît l'église Saint-Hilaire de Gignod.

La descente est ardue. Tellement que par endroits des escaliers y ont été aménagés. Sur 1.300 mètres, nous perdons en effet 230 mètres d'altitude, soit une pente moyenne de près de 18% ! Si vous ignoriez encore que vous aviez des quadriceps...

L'église Saint-Hilaire de Gignod fut construite au XVè siècle. Malgré différents travaux de rénovation en 1895, elle a conservé presque intact le plan initial. L'intérieur est richement décoré.

Dans les environs immédiats de l'église, nous pouvons observer différents monuments et une esplanade procurant un beau panorama sur la vallée.

A proximité se trouve aussi la Maison des Associations.

Parlant d'association, c'est ici que je me sépare de mes compagnons de route, ceux-ci préférant marquer une pause.

600 mètres plus loin, en continuant sur la Via Francigena, se dressent la maison communale et, à l'arrière de celle-ci, la tour de Gignod.

La tour, probablement du XIIè-XIIIè siècle, s'élevait initialement à l'intérieur d'une enceinte fortifiée. Il est possible qu'elle ait servi de tour de signalisation pour communiquer avec d'autres châteaux valdôtains.

Depuis le promontoire rocheux sur lequel elle est située, on dispose d'un beau point de vue sur la région.

À la maison communale commence une longue descente vers le fond de la vallée du torrent Buthier. Deux kilomètres alternant petites routes asphaltées et chemins.

Nous évoluons dans un cadre majestueux.

Là, nous récupérons la route régionale SR28 qu'il va bien falloir suivre pendant deux nouveaux kilomètres en direction d'Aoste. On se distraira en regardant les nombreuses pommeraies qui la bordent...

... ou en admirant les superbes façades de ces deux petites églises que sont celles de Variney et de Signayes (église Saint-Bernard).

Signayes, c'est là que nous quittons la route régionale pour grimper sur la colline à l'ouest, à travers les vignes.

Aussitôt grimpé, aussitôt descendu ! Par la Via Edelweiss en direction du centre-ville d'Aoste...

Aoste possède bien le charme des villes italiennes, colorées et chaleureuses. Nous pouvons le vérifier en arrivant à la piazza Pietro Leonardo Roncas où se trouve le Musée Archéologique Régional.

Plus loin, la place Jean XXIII accueille nos pas et nous nous trouvons face à la cathédrale Notre-Dame de l'Assomption, le plus ancien et sans doute le plus important édifice chrétien de la région.

Son aspect actuel date de la fin du XVè - début du XVIè siècle mais un édifice s'élevait déjà ici au IVè siècle, début de la christianisation du Val d'Aoste.

Il est 13 heures quand j'arrive à la cathédrale. Ne rouvrant qu'à 15 heures, je n'aurai donc pas la possibilité de la visiter aujourd'hui mais en voyant la richesse des décorations extérieures, il est clair que j'y reviendrai un jour !

Continuons pour arriver place Emile Chanoux où la maison communale affiche toute sa grandeur, occupant carrément tout un grand côté de la place !

Emile Chanoux était un des principaux protagonistes de l'autonomie de la région de la Vallée d'Aoste qui sera inscrite dans la Constitution en 1948 et un grand défenseur de la langue française. Arrêté par les fascistes en 1944, il meurt en prison dans des circonstances troublantes.

Le français, lui, est depuis 1948 une des deux langues officielles de la région, avec l'italien bien sûr. Je dois toutefois constater, de mon expérience personnelle, que de moins en moins de gens le parlent alors que la région était exclusivement francophone depuis le Moyen Âge, lorsqu'elle appartenait au royaume de Bourgogne.

Continuant notre visite d'Aoste, sur la Via Francigena, nous atteignons ensuite la Porta Pretoria. Construite en 25 avant JC, elle est toujours en très bel état.

Des deux tours qui l'encadrent, celle du sud est celle qui a le moins souffert des modifications effectuées à travers les âges.

La chaussée originelle mise au jour récemment est visible sous les passerelles qui traversent la porte.

Avec la cathédrale, la collégiale des saints Pierre et Ours est l'autre monument emblématique d'Aoste. Elle ne se trouve pas exactement sur la Via Francigena mais le détour ne sera pas long et il en vaut vraiment la peine.

Construite entre 994 et 1025 dans un style entre le roman et le gothique, elle subit au XVIè siècle d'importantes transformations qui lui apportent son style gothique actuel.

Son clocher, séparé de l'édifice, repose sur des pierres issues probablement de bâtiments romains des environs.

L'intérieur est très riche. Une partie remarquable du sol en mosaïque du XIIè siècle montrant Samson tuant le lion est visible à travers une lucarne carrée au sol.

La partie la plus célèbre de la collégiale est sans doute son cloître auquel je n'ai malheureusement pas pu accéder.

En sortant de la collégiale, à gauche, on peut observer le prieuré et sa tour octogonale datant du XVè siècle.

Il ne faut pas marcher plus de 300 mètres pour arriver au monument suivant, l'Arc de triomphe d'Auguste.

Erigé en 25 avant JC pour commémorer la victoire des Romains sur les Salasses, il est constitué d'un arc unique de 11,4 mètres de haut.

150 mètres plus loin, après avoir traversé le Buthier, nous passons sur un pont de pierre construit en 24 avant JC. A l'époque, il permettait de franchir le torrent mais celui-ci fut détourné au Moyen Âge à la suite d'inondations.

Le quartier du pont de pierre est l'un des plus anciens et caractéristiques d'Aoste.

Nous quittons Aoste par la Via Vaccari en direction de Saint-Christophe. C'est certes une route asphaltée - et vous connaissez mon aversion pour ce genre de route - mais elle évolue en hauteur, nous procurant un beau panorama sur la vallée d'Aoste et les montagnes avoisinantes.

Finalement, contrairement à mes craintes, la traversée d'une grande ville fut, pour une fois, intéressante.

A Saint-Christophe, l'église éponyme domine la vallée. Son parvis nous offre une autre occasion de contempler la vallée.

De l'église Saint-Christophe, il nous faudra encore accepter 1.300 mètres de route asphaltée avant de retrouver un chemin de montagne à Villaggio Ollignan, un hameau de la commune de Quart.

Nous avons repris de la hauteur. Les pommeraies et les vignes se disputent le terrain sur ce flanc de vallée exposé au sud.

Dans un premier temps, le large chemin de terre court à l'horizontale à travers le vignoble. En ce début septembre, les viticulteurs s'affairent autour du raisin, sans doute pour préparer la future récolte.

Au détour du chemin, une borne assez imposante et en tout cas inhabituelle nous rappelle que nous sommes sur la Via Francigena. La "Via Francigena pour tous", même.

En fait, entre le Monastero Madre della Misericordia, inauguré le 16 juillet 1989 par le pape Jean-Paul II, et le château de Quart, le chemin a été aménagé sur 2,5 kilomètres pour être accessible aux familles.

Il longe les Rus Souverou et Prévôt, deux anciens canaux d'irrigation datant du Moyen Âge.

À la fin du parcours, nous découvrons le château de Quart dominant la vallée, accroché à la colline. Il fut construit en 1185 par la famille des Seigneurs de la Porte de Saint-Ours qui deviendront par la suite Seigneurs de Quart. C'est Henri, le dernier d'entre eux, alors prévôt d'Aoste, qui fut à l'initiative de la construction des deux rus que nous suivons.

Nous continuons vers l'est, direction Povil, un hameau de Quart, et sa maison fortifiée.

Ensuite, de Povil à Champ Désert, encore sur la commune de Quart, ce sont trois kilomètres d'une petite route asphaltée qui nous attendent.

Si nous évoluons toujours dans un cadre majestueux, cette portion de l'itinéraire est quand même ennuyeuse. Disons qu'après 23 kilomètres de marche, la fatigue commence peut-être à se faire sentir...

Si c'est la fatigue, il faudra alors m'expliquer pourquoi, en quittant cette route asphaltée à la limite administrative entre Quart et Nus, je me sens pousser des ailes.

Nous suivons alors le Ru Mazod sur un chemin sauvage absolument fabuleux et... excitant. Mais pourquoi donc tous les chemins ne sont-ils pas comme celui-ci ?

En tout cas, pendant 2,2 kilomètres, jusqu'au torrent de Saint-Barthélémy, c'est l'extase !

Il me reste un petit kilomètre pour rejoindre la gare de Nus en traversant le village. Au passage, j'ai encore l'occasion de découvrir le pont sur le torrent Saint-Barthélémy et d'apercevoir l'ancien château des Seigneurs de Nus qui domine le village à l'entrée du vallon.

Le château initial datait sans doute d'avant le XIIIè siècle mais il fut détruit par un incendie au XVIè siècle. Son aspect actuel remonte à 1595, année de sa reconstruction.

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Si vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D, c'est ici :

Appréciation du parcours :

Hormis les deux ou trois (trop) longues portions asphaltées, cette étape fut pour moi une belle surprise, surtout dans la traversée de la ville d'Aoste. Les banlieues de grandes villes ne sont jamais très excitantes mais ce ne fut cette fois pas le cas.

Sinon, les début et fin de parcours sont d'une beauté absolue et Aoste recèle de trésors inattendus. Voilà certainement une ville qui vaut qu'on s'y attarde un peu.

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Comment rejoindre cette étape ?

Comme je l'écrivais hier, le Val d'Aoste est bien desservi par les transports en commun.

Dans sa partie nord, entre Aoste et Saint-Rhémy-en-Bosses, ce sera impérativement le bus. Ils circulent régulièrement.

À l'est d'Aoste, on aura le choix entre le bus et le train.

En ce qui me concerne, logeant à Châtillon, je comptais initialement y prendre le train jusqu'à Aoste, puis le bus jusque La Clusaz. Finalement, pour gagner du temps et ne pas commencer à marcher trop tard, je suis allé en voiture jusqu'à la gare d'Aoste. En fin de randonnée, j'ai pris le train de Nus à Aoste pour la récupérer.

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Vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi.

!!! Attention, nous sommes en montagne et le GPS peut perdre en précision. C'est pourquoi vous constaterez sans doute que la trace GPX ne correspond pas toujours avec le tracé des chemins sur la carte.

Soyez prudents si vous effectuez le parcours. Ne vous aventurez pas là où vous auriez un doute et suivez toujours le balisage du sentier !!!