23 septembre 2023 - La Via Francigena d'Aulla à Sarzana

Hier, vendredi, de violents orages ont dominé la région toute la journée, rendant la randonnée impossible. J'ai dû adapter mon programme en conséquence. Forcé au repos hier, je prévois à la place de marcher dimanche, ce qui ne devrait entraîner aucun souci concernant les transports en commun au début et à la fin du parcours.

L'étape d'aujourd'hui me conduit, heureusement sous un soleil retrouvé, de Aulla à Sarzana. Elle est bien plus courte que la précédente, mais présente un relief beaucoup plus escarpé.

Nous allons ainsi quitter la province de Massa-Carrara en Toscane pour celle de La Spezia en Ligurie.

Par principe, je reprends toujours le parcours de la Via Francigena là où je l'ai arrêté à la fin de l'étape précédente. C'est encore le cas aujourd'hui.

Mais ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi j'emprunte la Via Lunigiana plutôt que de continuer la voie verte qui m'aurait emmené au centre de Aulla de manière bien plus agréable.

Le balisage m'a-t-il induit en erreur ? Étais-je mal réveillé ? Mystèèèère !

Bon, quoiqu'il en soit, au bout d'un petit kilomètre les deux chemins se rejoignent sur la Viale Lunigiana où nous empruntons un sympathique passage piétonnier surplombant à la fois la ville et la Fiume Magra.

Sympathique, ce n'est pas ce qu'ont dû penser les habitants de Aulla quand, le 25 octobre 2011, la rivière quitta son lit à la suite de fortes précipitations. Deux habitants perdirent la vie et de nombreux bâtiments dont la bibliothèque municipale et l'école primaire furent détruits.

Ce mur sur lequel nous marchons est probablement la solution localement apportée à cette catastrophe de 2011 qui aura touché toute la région mais je n'ai trouvé aucune information le confirmant.

Au bout du mur, nous découvrons l'Abbazia di San Caprasio.

Du monastère, je n'ai pu que visiter l'église. Celle-ci est vraiment très simple. Basique peut-on dire, même.

L'ensemble de l'édifice a été fondé en 884 mais, comme on s'en doute, il subit de nombreuses modifications à travers les siècles. Pendant la seconde guerre mondiale notamment, Aulla étant une ville stratégique, le monastère fut sévèrement endommagé.

Le presbytère abrite la tombe monumentale de San Caprasio, un saint ermite des îles de Lérins, sur la côte provençale.

Le monastère se trouve à deux pas du confluent de la rivière Magra et du ruisseau Aulella. Celui-ci est dominé par la forteresse de Brunella, confirmant l'importance stratégique de la ville. Cette forteresse est d'ailleurs l'ouvrage défensif le plus puissant de la Lunigiana.

Si elle est mentionnée en 1553, sa construction est bien antérieure mais la date exacte reste encore inconnue. Ce qui est quasi sûr, c'est qu'elle remplaça une forteresse médiévale.

Son nom vient de la pierre brune utilisée pour sa construction.

Attention, nous sommes surveillés !

Nous quittons la ville d'Aulla par le sud. Après avoir traversé le Torrente Aulella, nous attaquons la montagne quasi sans transition.

Jusqu'aux quelques maisons de Case Burcione, nous faisons face à la plus grande difficulté de l'étape. 600 mètres d'ascension à plus de 15% sur un chemin par endroits raviné par les pluies !

Après Case Burcione, la pente s'adoucit un peu (10% au lieu de 15) mais quelques obstacles ralentissent la progression. Les amoureux de nature sauvage seront comblés.

Au bout de 1.200 mètres d'ascension, nous sommes récompensés par une superbe vue sur la vallée de la Magra, avec Aulla à nos pieds !

Nous atteignons le premier sommet de la randonnée après 4,3 kilomètres de marche. A cause de la végétation qui l'obstrue, la vue y est (un peu ?) moins spectaculaire.

Puisque nous étions sur un sommet, nous ne pouvons que descendre. 250 mètres seulement nous séparent de Bibola, un hameau de Aulla spectaculairement perché sur un promontoire.

L'existence de Bibola est déjà mentionnée au VIIè siècle alors qu'elle était encore une colonie aux mains des Romains d'Orient, aujourd'hui appelés Byzantins.

Ceux-ci y installèrent un château encore visible de nos jours pour défendre le port de Luni, un des principaux débouchés de la région sur la mer.

Une dame âgée, s'appuyant sur une canne pour se déplacer, m'accueille à l'entrée du hameau et, malgré son handicap, m'accompagne pendant la visite.

De ce que je parviens à comprendre - ne parlant pas italien - il ne reste que trois familles dans le hameau, la plupart des habitants s'étant installés à Aulla où les conditions de vie sont bien meilleures que perdus ici dans la montagne !

De Bibola, la vue sur la vallée est magnifique !

On aperçoit même clairement en contrebas le hameau de Vecchietto, notre prochaine destination !

Ayant pris congé de ma guide improvisée, je m'engage sur la petite route asphaltée nous amenant à Vecchietto.

Nous bénéficions sur le parcours de beaux points de vue sur la vallée mais c'est surtout la vue arrière vers Bibola qui sans doute nous captivera.

Au bout de six kilomètres, soit au tiers de la randonnée, nous arrivons à Vecchietto, un autre hameau perdu dans la montagne où le temps s'est arrêté. Que du bonheur jusqu'ici !

A Vecchietto débute la seconde ascension de la journée. 2,6 kilomètres d'ascension avec deux passages à plus de 15% mais surtout d'impressionnantes vues sur la région !

Le paradis du randonneur se trouve peut-être bien (aussi) en Lunigiana !

Nous débouchons sur un chemin plus large, au lieu-dit Quattro Strade. Comme son nom l'indique, un carrefour de quatre chemins. Nous ne sommes plus qu'à deux cents mètres du sommet de l'étape, à 544 mètres d'altitude.

Le sommet passé, nous retrouvons un étroit sentier descendant vers Ponzano Superiore, un hameau de Santo Stefano di Magra.

C'est un kilomètre après le sommet que nous aurons quitté la province de Massa-Carrara pour celle de La Spezia. La Toscane pour la Ligurie par la même occasion.

500 mètres avant d'arriver au hameau, nous quittons la forêt. Un somptueux paysage s'ouvre devant nous !

Et au bout de quelques mètres apparaît, dans la brume de chaleur, la mer de Ligurie !

Enfin... Notez qu'il existe un désaccord à ce sujet entre l'Italie et l'Organisation hydrographique internationale. Pour la première, la limite sud de la mer de Ligurie se situe au niveau du canal de Corse, donc bien plus au sud qu'ici. Tandis que pour la seconde, cette limite se trouve à hauteur de La Spezia. Officiellement, ce que nous apercevons au loin serait donc plutôt la mer Tyrrhénienne.

Loin de ces polémiques nous continuons notre petit bonhomme de chemin tout en profitant du paysage...

La Via Francigena bifurque à gauche à l'entrée de Ponzano Superiore. Néanmoins, une petite visite du hameau s'impose. Non seulement parce qu'il n'est pas dénué de charme mais aussi pour sa position stratégique sur un contrefort en saillie du Monte Grosso.

Et certainement pour le panorama dont on bénéficie depuis la Piazza Colonna !

Quittant le hameau par la Via Cesare Orsini, on ne manquera pas de jeter un œil à l'ancien lavoir.

Le Cesare Orsini dont il est fait référence ici est le poète du XVIè-XVIIè siècle qui grandit ici, élevé par un oncle, et non l'homme politique du XIXè siècle que vous connaissez tous, n'est-ce pas ?

C'est en quittant Ponzano Superiore qu'on réalise le mieux la position du hameau sur un promontoire.

Les pèlerins de la Via Francigena sont appréciés, ici !

Nous continuons à descendre vers Sarzana...

1,5 kilomètre après avoir quitté Ponzano Superiore, le décor change quelque peu. Le sol devient schisteux, la végétation s'éclaircit.

Nous sommes à la limite entre Santo Stefano di Magra et Sarzana et leurs hameaux, Ponzano Superiore derrière, Falcinello en contrebas à l'arrière-gauche, rivalisent de beauté !

Cette zone schisteuse dans laquelle nous évoluons maintenant apporte un visage nouveau à cette étape. Superbe !

Sur cette colline, nous découvrons le Castello della Brina. Si nous savons qu'il fut construit au XIè siècle, la période de sa destruction, elle, reste inconnue.

Etait-ce en 1279 lorsqu'il fut au centre d'une lutte intense entre la famille noble Malaspina et Enrico da Fucecchio, évêque de Luni ? Mystèèèère...

Du Castello della Brina, ce sont deux nouveaux kilomètres de descente dans des paysages et sur des chemins variés qui nous conduisent au Canale Lunense.

Du premier projet présenté en 1794 à la réalisation du canal dans les années 1930 - la première pierre avait pourtant été posée le 24 mai 1881 -, il se sera donc écoulé 136 ans ! 136 ans de conflits, de palabres, de recours administratifs et autres chamailleries pour que ce canal d'irrigation voie enfin le jour !

Et il aura finalement fallu attendre 2017 pour qu'une piste cyclable et piétonne lui soit adjointe sur certains tronçons. Une très belle fin d'étape que ces près de trois kilomètres le long du canal !

Avant d'entrer dans Sarzana, il nous reste à traverser le Torrente Calcandola, bien sec aujourd'hui, et à le suivre sur 250 mètres.

Nous entrons dans Sarzana par la Porta Parma située au nord-ouest de la ville et construite au début du XVIè siècle.

Par la Via Bertoloni, nous gagnons la Piazza Giacomo Matteotti où s'élève la maison communale, un bâtiment carré de style gênois construit entre le XVè et le XVIè siècle.

Dans la Via Giuseppe Mazzini, la petite église paroissiale Sant'Andrea, construite entre le Xè et le XIè siècle, est le plus ancien édifice sacré de Sarzana.

Cent cinquante mètres plus loin nous débouchons sur la Piazza Niccolò V marquant la fin de cette étape.

On ne quittera bien sûr pas la place sans avoir visité la somptueuse co-cathédrale Santa Maria Assunta dont la construction en forme de croix latine dura de 1204 à 1474. Elle était alors de style gothique toscan tardif.

Des travaux d'embellissement entrepris au XVIIè siècle la convertiront au style baroque.

L'édifice abrite la croix de Maître Guglielmo (avant-dernière photo ci-dessous), une croix peinte datée de 1138. Il s'agit du plus ancien exemple connu de croix peinte datée.

Tous ces efforts valent bien une petite gâterie, non ?

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Vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D ? C'est ici :

Appréciation du parcours :

Avec cette étape, la Lunigiana nous offre encore un superbe moment sur la Via Francigena.

De magnifiques chemins de randonnée, des paysages somptueux, une nature sauvage, un patrimoine exceptionnel, le tout sur une distance raisonnable, voilà bien un cocktail particulièrement séduisant ! Je dis "encore" !

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Comment rejoindre cette étape ?

On peut presque répéter ce qui était écrit pour l'étape précédente. A la différence qu'Aulla se trouve sur la ligne de chemin de fer Parma - La Spezia tandis que Sarzana se trouve sur celle de Genova à Pisa. Mais cela ne change rien, les deux lignes étant connectées entre elles. Cette étape est donc facilement accessible en train.

Il faut toutefois rappeler que, complètement isolée, il ne fera pas bon laisser sa voiture à la gare d'Aulla pendant la nuit.

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Vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi. Je l'ai toutefois nettoyée de mes visites dans les villages de Bibola et Ponzano Superiore :