16 Septembre 2020
Ce matin, notre hôte à l'extrême gentillesse de nous amener au départ de l'étape à Berry-au-Bac. De ce fait, nous décidons de changer le point d'arrivée qui aurait dû être la cathédrale de Reims. Ainsi, en nous arrêtant plutôt à la gare de Reims, nous pourrons rentrer en bus à la chambre d'hôtes, à Bétheny. Ca raccourcit l'étape d'un gros kilomètre mais elle n'en restera pas moins la plus longue de la semaine.
Aucun changement côté météo mais, à l'analyse de la carte, nous devrions bénéficier de plus de couverts que les jours précédents.
En quittant Berry-au-Bac en direction de Cormicy, nous quittons à la fois le département de l'Aisne pour celui de la Marne et la région Hauts-de-France pour le Grand Est.
Nous commençons par traverser une grande plaine agricole, sur près de quatre kilomètres. En démarrant à 9hr15, il ne fait pas encore très chaud. Rejoindre Cormicy n'est donc qu'une formalité et nous remercions Sigeric de ne pas avoir coupé au plus court en passant par la D530 !
Nous sommes ici en limite de la Champagne crayeuse et cela se remarque dès le départ. La craie blanchit nos chaussures et nos tibias !
En approchant du centre de Cormicy, un vestige de rempart nous rappelle que la ville fut fortifiée au Moyen Âge. C'est en 1182, quand la commune reçoit de l'archevêque de Reims le droit de se gérer elle-même qu'on décide de fortifier la ville, pour protéger le grenier à sel.
Cormicy se trouve depuis toujours sur les voies de communications entre Reims et le nord de l'Europe. Cette position stratégique a contribué à sa richesse mais lui valut de vivre bien des vicissitudes.
La ville est plusieurs fois incendiée ou détruite mais, chaque fois reconstruite, elle se dote d'équipements que ne possèdent pas ses voisines. Ainsi, au XIVè siècle, elle possède déjà son hôpital.
Outre sa position, ses ressources naturelles ainsi que les foires et marchés qu'on y organise font sa richesse. L'agriculture mais aussi ses forêts sont d'importantes sources de revenus. On y exploite aussi les cendres sulfureuses qu'on répand dans les vignes.
Pendant la première guerre mondiale, la ville et ses hameaux sont quasi complètement détruits. Il ne reste à Cormicy que quatre bâtiments datant d'avant 1914. Mais contrairement à la plupart des autres villes et villages détruits, la reconstruction est confiée à un seul architecte, ce qui confère à la ville actuelle une belle homogénéité.
L'église Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte date du XIIè siècle. Elle ne fut que partiellement détruite pendant la première guerre mondiale. Quant à la mairie, elle fut agrandie par rapport au bâtiment existant avant la guerre.
À la sortie de Cormicy, en nous attaquant à l'ascension de la Grande Montagne - rien à voir avec les Alpes, on culmine ici à 197 mètres -, nous découvrons notre premier vignoble de Champagne. Des écrits attestent de son existence déjà au IXè siècle et son vin était réputé.
Après les destructions de la première guerre mondiale, le vignoble n'est pas replanté. Il faut attendre 1960 avant de voir à nouveau des vignes sur les flancs de la colline exposés à l'est et au sud.
Le vignoble traversé, nous pénétrons alors dans la forêt de la Grande Montagne en direction d'Hermonville. Pendant deux kilomètres, nous parcourons un très joli et agréable sentier qui suit la crête.
Nous débouchons ensuite sur le plateau de Bellevue d'où, je persiste à le dire malgré le désaccord avec Kévin, nous bénéficions d'une belle vue sur la région environnante.
Entre le Mont Chatté et la D30, Nous descendons alors du plateau à travers une étroite languette boisée - 300 mètres quand même - pour aboutir au vignoble d'Hermonville.
À l'entrée d'Hermonville, nous faisons une halte déjeuner à l'emplacement de l'ancien moulin de la Bonne Fontaine dont seule la retenue d'eau est encore visible. Il servait à moudre le grain.
Deux cours d'eau traversent la commune, dont la Robassa qui alimentait le moulin. Il est intéressant de noter que tous deux n'aboutissent nulle part. Leurs eaux sont absorbées par le sol crayeux.
Un peu plus loin, on peut par contre encore voir l'ancien lavoir.
Hermonville est un superbe petit village où il semble faire bon vivre. Avec le soleil que nous connaissons, nous avons même l'impression d'être dans le sud ! Attention, je ne veux pas dire par là qu'il vaut mieux vivre dans le sud que dans le nord, n'est-ce pas !
Notre visite du village se poursuit par un petit tour auprès de la magnifique église Saint-Sauveur. Datant du milieu du XIIè siècle, elle est précédée d'un avant-porche champenois.
Un véritable coup de cœur !
La place du village, devant la mairie, a été récemment rénovée. Avec toutes ses voiries et ses infrastructures neuves, on se dit que la commune doit être bien riche. En tout cas, si elle ne l'était plus, elle l'a été ! Le village a ainsi compté jusqu'à sept châteaux sur son territoire, dont la plupart n'ont cependant pas été reconstruits après la première guerre mondiale.
Au niveau économique, bien sûr, il y a le vin. Mais aussi les asperges et les carrières de pierre à bâtir. C'est d'ailleurs d'ici que viennent les pierres qui ont servi à la construction de la cathédrale de Reims.
Les carrières ont aussi été utilisées dans le passé pour la culture des champignons. Il existe ainsi 50 hectares de galeries datant de 1882.
À l'exception de deux courtes périodes en début et fin de première guerre mondiale, Hermonville est resté aux mains de l'armée française. Pour la petite histoire, c'est ici qu'en 1915 est créée l'école des missions spéciales ayant pour objectif de former dans le plus grand secret des dizaines d'espions qui allaient être envoyés derrière les lignes allemandes.
Nous poursuivons notre randonnée vers le sud, en direction de Merfy. Jusqu'à l'ancienne ferme du château de Toussicourt, le chemin, agréable, offre une alternance entre passages ombragés et passages en plein soleil.
Il est cocasse de noter que, si le château de Toussicourt fait partie de ceux qui n'ont pas été reconstruits à l'issue de la première guerre mondiale, son mur d'enceinte, lui, existe toujours et nous oblige à faire un détour.
Passés l'ancienne ferme du château, nous nous engageons à nouveau dans un très beau petit sentier qui court à travers bois pendant 3,5 kilomètres. Vu la chaleur de cet après-midi, c'est une véritable bénédiction !
De Merfy jusqu'au canal de l'Aisne à la Marne, à hauteur de Saint-Brice-Courcelles, le parcours n'est guère enthousiasmant. Jusqu'à l'autoroute A26, aussi appelée autoroute des Anglais, nous évoluons en plein soleil. Tout juste notre attention sera-t-elle attirée par ce qui nous semble être un champ de... cannabis !
Après l'autoroute, c'est par une zone industrielle que nous rejoignons le canal ! Bof bof...
Nos avis sont ensuite plus partagés sur les 2,5 km pendant lesquels nous suivons le canal de l'Aisne à la Marne sur la rive droite (nous tournons en effet le dos à l'écluse N° 1 qui se trouve à Berry-au-Bac). Bien sûr, la berge opposée à la nôtre est occupée par des bâtiments industriels mais ce contraste entre nature et industries ne me déplaît pas. D'autant que certains vestiges du passé ne manquent pas de caractère.
Et puis, le canal et notre berge font l'objet d'une activité sportive qui fait plaisir à voir. Sur le canal, des rameurs s'entraînent à l'aviron sous le regard attentif de leurs coachs tandis que, sur le chemin de halage, nous croisons cyclistes, joggeurs, marcheurs... Il faut juste tenir sa droite, ou marcher sur le bas-côté.
Peu avant l'échangeur routier de Reims-centre, nous traversons le canal pour faire une incursion dans le très beau Parc de la Patte-d'Oie et son cirque. Ça nous fait une belle voie verte pour entrer dans Reims et rejoindre la gare.
Et enfin, les 500 mètres finaux par les Basses Promenades pour rejoindre Colbert qui nous attend devant la gare de Reims !
Evidemment, on peut apprécier différemment les derniers kilomètres le long du canal, mais cela mis à part, le reste de la randonnée du jour fera, je pense l'unanimité.
Hormis le trajet entre Merfy et le canal qui ne restera pas dans les meilleurs souvenirs de la Via Francigena, l'itinéraire est très joli et agréable. On passe beaucoup de temps dans les bois sur de superbes chemins et les villages traversés ont un charme certain. Et puis, on se réjouit de découvrir le vignoble champenois.
Assurément la plus belle étape des trois premiers jours de cette semaine de randonnée !