27 Août 2021
Bon, le miracle ne s'est pas produit, cette nuit. J'espérais retrouver mes pieds en suffisamment bon état pour pouvoir parcourir les vingt kilomètres prévus entre la gare TGV de Besançon et Morre mais ce n'est pas le cas.
Je suis toutefois loin de m'avouer vaincu et je décide donc de raccourcir l'étape à une douzaine de kilomètres, me permettant ainsi de rejoindre le centre de Besançon. Et si vraiment ça n'allait pas, la randonnée se déroulant pour une grande partie en agglomération, je n'aurai aucune peine à trouver un bus pour me ramener au bercail.
Je rejoins la gare de Besançon Franche-Comté TGV en TER depuis la gare de Besançon-Viotte située en centre-ville.
À cause du relief tourmenté de la ville, et pour des raisons de coût, il n'était pas pertinent d'y installer la gare TGV. Malgré l'opposition des habitants consultés par référendum, celle-ci fut quand même construite à l'extérieur et est opérationnelle depuis le 11 décembre 2011. Les élus obtinrent toutefois la construction d'une ligne ferroviaire entre les deux gares.
Parallèlement à la création de la gare, Grand Besançon Métropole décide de l'aménagement d'un parc d'activités économiques, "La Nouvelle-Ère". Initialement, il devait couvrir une superficie de 35 hectares. Mais pour des raisons écologiques, il fut ramené à 25 hectares. Depuis 2017, on ne compte qu'un seul bâtiment, le centre d'affaires "Le Signal". On ne peut pas dire que le succès soit au rendez-vous...
Une voie verte relie la gare TGV à l'ancienne commune d'Auxon-Dessus à travers le Grand Bois. Ancienne commune puisque depuis le 1 janvier 2015, Auxon-Dessus à fusionné avec sa voisine Auxon-Dessous pour former Les Auxons.
A Auxon-Dessus, il est déjà fait mention d'une église à l'emplacement actuel de l'église Saint-Pierre à l'époque du Bas-Empire romain, soit entre le IIè et le Vè siècle.
Une nouvelle église fut bâtie en 1133 mais connu les affres des invasions. En piteux état, elle fut restaurée une première fois en 1741 sur ordre de l'Archevêque Antoine de Grammont. On y trouve plusieurs objets d'art, dont des tableaux, datant du XVIIè siècle.
Quittant Auxon-Dessus par le sud-ouest en direction de Miserey-Salines, la Via Francigena longe en hauteur la ligne de chemin de fer empruntée tout à l'heure pour rejoindre la gare TGV.
De ce chemin agréable courant à travers bois, nous bénéficions par endroits de belles vues sur la campagne environnante.
Si depuis la gare TGV nous évoluions sur un relief plutôt plat, le passage de la ligne de chemin de fer marque, avec près de 900 mètres de dénivelé positif, le départ de l'étape la plus "montagnarde" depuis que nous avons quitté Calais.
Car ça monte pour rejoindre Miserey-Salines !
Miserey-Salines tient son nom de la saline qu'on exploita ici de 1868 à 1967.
C'est en effet en 1868 que deux ingénieurs des mines découvrirent un banc de sel de 55 mètres d'épaisseur. On en est extrait un million de tonnes de sel !
Les eaux salines qui en sortent sont d'une qualité tellement exceptionnelle, parmi les meilleures d'Europe, que des investisseurs décident, non sans mal, de la création de Besançon-les-Bains, un complexe hôtelier et thermal comprenant également un casino. C'est ainsi qu'une conduite souterraine relie directement le gisement à l'établissement thermal.
Mais avec la première guerre mondiale, commence le déclin du thermalisme. De plus, les promoteurs du projet disparaissent les uns après les autres. Après avoir été laissés à l'abandon durant plusieurs années, les thermes seront finalement démolis pour laisser la place à un hôtel.
Depuis 2012, Miserey-Salines a vu sa population fortement augmenter. La construction de la ligne TGV mettant Paris à 2 heures n'y est sans doute pas étrangère. Le village a su néanmoins garder un charme indéniable.
C'est notamment le cas de l'église Saint-Ferréol et Saint-Ferjeux construite vers 1720. On peut y observer des statues en bois peint du XVIè et un retable en bois doré du XVIIIè.
En arrivant à École-Valentin, nous faisons une courte incursion dans le Bois des Razchênes. Quatre cents mètres seulement, certes, mais de toute beauté !
S'il n'avait s'agit du dernier passage naturel de l'étape, sans doute cela n'aurait pas valu la peine d'être mentionné, alors profitons-en !
Nous quittons le Bois des Razchênes par l'arboretum...
... et la commune par la D 108. À partir d'ici, et jusqu'à l'arrivée de l'étape, soit pendant les cinq derniers kilomètres, il n'y aura plus ni sentier, ni chemin de campagne.
À Pirey, nous empruntons une route asphaltée, la route de Pirey. Mais réservée aux bus, le trafic y est nul.
Aux Montboucons, nous entrons alors sur le territoire de Besançon.
Pour l'anecdote, la romancière Colette possédait ici un domaine où elle passa les étés de 1902 à 1908.
Passés au-dessus de la N 57, nous arrivons à Besançon Montrapon.
En suivant l'avenue des Montboucons, c'est un parc d'activités lié à l'université de Besançon que nous traversons. On y trouve aussi la gare routière Temis d'où on peut aisément gagner le centre-ville en transports en commun.
L'université de Besançon, Université de Franche-Comté de son nom officiel, fut en réalité créée en 1423 à Dole par Philippe Le Bon, duc de Bourgogne. Après une histoire mouvementée, elle fut définitivement transférée à Besançon sur ordre de Louis XIV lorsque celui-ci en fit la capitale de la Franche-Comté. Nous sommes alors en 1691.
Parmi les personnalités l'ayant fréquentée, on peut citer parmi d'autres Robert Badinter, professeur de droit privé en 1968-1969 et Jean-Luc Mélenchon y obtient sa licence de philosophie en 1972.
La ligne de chemin de fer Mulhouse - Dijon/Lyon qui passe par la gare de Besançon-Viotte marque la limite avec le quartier de Besançon Battant.
Battant est l'un des quartiers les plus anciens et les plus populaires de Besançon. L'existence de ce faubourg est attestée depuis l'époque gallo-romaine. Y vivaient essentiellement des vignerons, des tanneurs, des ouvriers et des lavandières.
Battant tire d'ailleurs son nom du petit ruisseau de La Mouillère qui le traversait et sur lequel était installé un battant à fouler les draps.
Au XIIè siècle, le quartier fut ceint de remparts, puis échappa à la modernisation de la ville. Cependant, à partir des années 1980, l'habitat devenu insalubre fut rénové. On préserva fort heureusement le caractère du quartier en conservant les façades des maisons et son tissu économique fait de petits commerces. Battant est ainsi resté un des quartiers les plus pittoresques et dynamiques de la ville.
Fin du XVIè siècle, les remparts de Battant furent modifiés et on construisit un bastion sur le haut du quartier, dominant la courbe du Doubs.
Le fort Griffon, du nom de l'architecte Griffoni qui en assura la réalisation, fut à son tour détruit par Vauban. Tout comme les remparts de Battant, d'ailleurs.
De 1680 à 1684, de nouvelles fortifications sortent de terre. Le nouveau fort Griffon, beaucoup plus grand que l'ancien, prend ainsi des airs de citadelle avec sa chapelle et ses casernements permettant d'accueillir 140 hommes.
En 1788, le fort devient une prison d'état. Redevenu militaire pendant la seconde guerre mondiale, il est ensuite racheté par le Département qui en fait une école d'institutrices. Depuis 1991, il accueille l'Ecole supérieure du professorat et de l'éducation.
Le fort Griffon est classé au Patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 2008, au sein du Réseau des sites majeurs de Vauban.
Du fort Griffon, nous descendons vers le Doubs par les rues des Frères Mercier et de la Madeleine. Et nous terminons cette étape de la Via Francigena à l'angle de la rue Battant.
C'est aussi ici que prend fin mon périple 2021 sur la Via Francigena et je vous donne rendez-vous en 2022 pour vingt nouvelles étapes qui m'emmèneront alors jusqu'à la vallée d'Aoste, en Italie, après avoir traversé la Suisse.
De très belles étapes en perspective avec la traversée du Jura, le lac Léman et l'ascension du Grand Saint-Bernard. J'ai déjà hâte d'y être !
Raccourcie à douze kilomètres, cette étape offre peut-être finalement le bon compromis. Pendant les deux premiers tiers du parcours, nous évoluons majoritairement dans la nature avec des passages vraiment très agréables.
Puis, le dernier tiers se passe en agglomération mais les différents quartiers de Besançon, avec leurs visages variés et leurs intérêts particuliers, font que les kilomètres s'avalent sans trop de difficultés. Et pourtant, on ne peut pas dire que j'étais dans une forme resplendissante...
Si vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena, vous trouverez ci-dessous la trace GPX :
Besançon, berceau de l'horlogerie française
Ce serait réducteur de ne voir Besançon que comme berceau de l'horlogerie française tant la ville possède bien d'autres atouts pour en faire une destination touristique (ou professionnelle) incontournable.
Préfecture du département du Doubs, siège de la région Bourgogne-Franche-Comté, capitale historique et culturelle de la Franche-Comté, la cité a toujours joué un rôle important depuis l'époque gallo-romaine.
La citadelle
Établie dans un méandre du Doubs, située à la limite du Jura et à une soixantaine de kilomètres de la Suisse, la ville revêtait une importance militaire évidente.
Ainsi, si le visiteur retiendra sans aucun doute Vauban comme architecte de la fortification de la ville telle que nous la connaissons aujourd'hui, il ne faudrait pas oublier que Charles-Quint y avait déjà mis sa patte auparavant.
Construite donc par Vauban, de 1678 à 1683, la citadelle est bien sûr la pièce maîtresse du système défensif. Perchée à une altitude tournant autour des 350 mètres, elle domine la courbe du Doubs. Monument le plus visité de Franche-Comté, on y trouve entre autres un zoo et le musée de la Résistance et de la Déportation.
Si vous avez de la chance, Vauban lui-même vous emmènera dans ses entrailles. Un truculent personnage, ce marquis de Vauban...
Balades urbaines
La citadelle n'est évidemment pas le seul attrait de Besançon. La vieille ville vaut assurément qu'on y passe quelques heures et quoi de mieux que la balade pédestre pour la découvrir. Alors, je n'ai qu'un conseil à vous donner : filez vite à l'Office du Tourisme vous procurer ces trois cartes !
Je ne vais pas refaire avec vous ces trois balades qui valent vraiment la peine. Mais si vous n'êtes pas tout à fait convaincus, je vous en partage ici quelques photos :
Et si vos pieds sont fatigués, je vous recommande également cette balade en bateau sur le Doubs. En plus de voir la ville et la citadelle sous d'autres angles, vous passerez dans le tunnel creusé sous la citadelle.
Percé entre 1878 et 1882, il permet aux bateaux de "court-circuiter" la boucle du Doubs. Doubs qui est d'ailleurs canalisé afin de permettre la jonction entre le Rhin et le Rhône.
Et bien sûr, n'oubliez pas de visiter le Musée du Temps !
La grotte d'Osselle
Enfin, pour terminer, je voudrais vous emmener à quelques kilomètres de Besançon. À la grotte d'Osselle, précisément.
Là aussi, il faudra chausser vos chaussures de randonnée car avec un parcours souterrain de 1.200 mètres, elle est l'une des plus longues de France. C'est aussi la plus ancienne grotte visitable du pays puisque, découverte au XIIIè siècle, les visites y sont organisées depuis l'an 1504 !
Par ailleurs, c'est ici que fut découvert le premier squelette complet d'ours des cavernes. En fait, la grotte est considérée comme le plus grand gisement d'ours des cavernes au monde. On en découvrit encore quinze en 1970 !
Je vous épargne les détails sur la formation de la grotte et sur ses concrétions. Ça, vous l'apprendrez sur place, et plus encore. Alors voici juste quelques photos :
Pour finir, puisque vous avez eu le courage de me lire jusqu'au bout, je vais vous confier un petit secret...
Le propriétaire de la grotte d'Osselle a accumulé depuis de nombreuses années une impressionnante collection de minéraux et de pierres semi-précieuses. Probablement une des plus belles collections au monde, jalousement gardée, quelque part, près de la grotte.
Normalement, cette collection ne se visite pas mais si vous allez à la grotte d'Osselle un jour de faible affluence - nous n'étions que cinq ou six pour la visite de ce jour - vous aurez peut-être la chance de vous voir offrir la visite de cette fabuleuse collection.
Et si on ne vous la propose pas, demandez, ça ne coûte rien. Parce que comme les photos sont interdites, ce sera votre seule chance de pouvoir l'admirer !