Parce que randonner c'est la santé...
12 Mai 2025
Le résumé du randonneur pressé :
Une première étape de 30 km entre Dole et Arc-et-Senans, qui débute par la découverte du patrimoine remarquable de Dole : canaux, collégiale, hôtels particuliers… et la maison natale de Louis Pasteur.
L’itinéraire s’enfonce ensuite dans la vaste forêt de Chaux pour plus de 20 km d’immersion tranquille sur des chemins variés, au cœur d’un univers végétal dense et changeant.
En fin de parcours, la forêt s’efface peu à peu, laissant entrevoir un autre décor… celui qui, demain, fera vraiment entrer le randonneur dans le Jura.
Et en détail :
Temps de lecture : 12 minutes
J'avais découvert le massif du Jura en marchant sur la Via Francigena, entre Besançon et Sainte-Croix en 2021-2022. Ce parcours m'a tellement marqué que je suis revenu plus tard, du côté du Cirque de Consolation (voir randonnée du 16 août 2023 : Le Cirque de Consolation par le Pissoux et le Dessoubre).
Mais cette fois, mon envie d'explorer va plus loin : c'est sur l'Échappée Jurassienne que je reprends le fil de cette découverte qui devrait m'emmener d'ici onze jours aux fameuses cascades du Hérisson.
En attendant, aujourd'hui, c'est une étape d'une trentaine de kilomètres entre Dole et Arc-et-Senans qui accueille mes pas. Une étape a priori pas trop difficile si ce n'est sa longueur.
Nous débutons le périple depuis la gare SNCF de Dole.
La ville a longtemps joué un rôle majeur en Franche-Comté. Ancienne capitale du comté de Bourgogne, elle était un centre politique et universitaire important jusqu’à son intégration au royaume de France en 1678.
Avec son emplacement stratégique sur le Doubs, elle a connu une grande prospérité avant de perdre son statut au profit de Besançon. Malgré ce changement, elle reste une ville marquée par son passé et son influence régionale.
Le GR59A nous le fait découvrir opportunément.
Au bout de l'avenue Aristide Briand, nous découvrons un premier bâtiment historique, l'ancien collège Saint-Jérôme.
Fondé en 1494 par l'ordre bénédictin de Cluny, il avait pour objectif de former les moines étudiant le droit canon à l'université de Dole, un des grands foyers intellectuels du Saint-Empire romain germanique.
En 1691, la conquête française entraîna le départ de celle-ci vers Besançon. Le collège se transforma alors en monastère jusqu'à la Révolution.
À partir de 1826, les bâtiments furent occupés par les sœurs de la Visitation jusqu'à ce que la ville de Dole en fasse l'acquisition en 1977.
Nous poursuivons notre visite du cœur historique de Dole, en direction de la collégiale Notre-Dame. Les maisons en pierre calcaire, typiques de la région, me plaisent beaucoup par leur sobriété et leur caractère.
On découvre la collégiale au détour de la rue de Besançon, dans toute sa majesté !
L'édifice est véritablement emblématique de Dole. Construit entre 1509 et 1574, il mêle harmonieusement les styles gothique et Renaissance. Son imposant clocher de 73 mètres domine la cité.
Classée monument historique en 1910, elle a été élevée au rang de basilique mineure en 1951.
J’aurais tellement aimé la visiter, mais elle était malheureusement fermée lors de mon passage. D’après ce que j’ai pu lire, elle abriterait un mobilier raffiné, dont un orgue exceptionnel du XVIIIe siècle.
Face à la collégiale Notre-Dame se trouve un autre lieu emblématique de Dole : les Halles, édifiées en 1883 sur l’ancien emplacement du Parlement de la ville.
Inspirée du style Baltard, leur structure mêle brique, fer et verre, offrant un bel exemple de l’architecture industrielle du XIXᵉ siècle. Ce style est particulièrement connu grâce aux Halles de Paris, qui furent longtemps le cœur du commerce parisien avant leur disparition en 1972.
Aujourd’hui, les Halles de Dole accueillent plusieurs marchés hebdomadaires où les producteurs locaux proposent fruits, légumes et spécialités régionales. Une halte prisée des amateurs de gastronomie.
En arrivant rue Pasteur, nous nous trouvons devant la maison natale de Louis Pasteur, un lieu chargé d’histoire où le célèbre scientifique vit le jour en 1822.
Pour ceux qui ont la mémoire courte, il est connu pour ses découvertes révolutionnaires en microbiologie, notamment la pasteurisation, qui permet de préserver les aliments, et pour avoir démontré que les microbes sont responsables des maladies, ouvrant ainsi la voie à la médecine moderne.
Curieusement, le tracé du GR59A fait tourner les randonneurs un peu trop tôt, les privant d’un passage devant cette maison emblématique. Il aurait suffi de prolonger la marche de trente mètres pour l’inclure naturellement dans l’itinéraire ! Une petite erreur de parcours que j’ai corrigée dans le fichier GPX mis à disposition en fin d’article, permettant ainsi aux marcheurs curieux d’y faire étape.
De là, nous gagnons le bord du canal des Tanneurs, un quartier de Dole absolument magnifique !
Longtemps animé par l’activité des tanneurs, qui y travaillaient le cuir jusqu’en 1931, il garde les traces de ce passé à travers ses maisons anciennes aux caves ouvertes sur l’eau. Aujourd’hui, c’est un lieu idéal pour flâner et apprécier le charme de la vieille ville... mais la route est encore longue, alors nous poursuivons notre chemin.
Nous atteignons le canal du Rhône au Rhin, qui marque notre sortie définitive du cœur historique de Dole.
Construit dès le XVIIIᵉ siècle, il relie la Saône au Rhin, offrant une voie de navigation stratégique entre le nord de l’Europe et la Méditerranée. Son nom vient du fait que la Saône est un affluent du Rhône, permettant ainsi une connexion indirecte entre les deux fleuves.
En jetant un dernier regard à la collégiale, nous tournons une page. Après avoir traversé des rues chargées d’histoire, nous nous apprêtons à plonger dans un tout autre univers.
Nous longeons un peu plus loin les rives du Doubs, près de l’arche restaurée du pont roman, le plus ancien vestige de Dole. Avant lui, un pont en bois, mentionné dès 1135, permettait déjà de franchir la rivière, constituant le premier grand passage sur le Doubs.
Construit au XIIIè siècle, le pont roman comptait autrefois 17 arches, dont seules deux subsistent aujourd’hui. Il fut un élément clé du développement de la ville, favorisant les échanges et marquant l’organisation du territoire autour du Doubs.
Prenant la direction du sud-est, nous quittons les rives du Doubs pour remonter pendant deux kilomètres la rue Charles Blind et la rue du Bizard. Le calme règne dans cette banlieue de Dole.
En lisière de la Forêt domaniale de Chaux, nous atteignons le parc animalier de la Sauline, où évoluent biches, sangliers et cerfs Sika. Ces derniers, originaires du Japon mais introduits en France dès le XIXè siècle, attirent immédiatement mon attention, ravivant le souvenir de mon voyage là-bas en 2019 - sans doute le plus beau de ma vie.
Après le Centre équestre de la Forêt de Chaux, nous entrons véritablement dans la Forêt domaniale.
Si nous suivons encore dans un premier temps une petite route asphaltée, nous pénétrons bientôt plus profondément dans la forêt. La variété des chemins et les différences de végétation rendent le parcours agréable.
Reste à voir si cette diversité nous accompagnera tout au long des 22 kilomètres de traversée.
Côté météo, la pluie fait son entrée à 9h41 pile. C'était attendu, la question était seulement de savoir quand elle arriverait. Et elle ne fait pas les choses à moitié : c’est une pluie qui mouille, bien décidée à accompagner ma progression.
Nous poursuivons notre progression à travers la Forêt domaniale de Chaux. Avec ses 22 000 hectares, elle s’impose comme l’un des plus vastes massifs feuillus de France. Et nous, sur nos 22 kilomètres de traversée, sommes à notre modeste échelle confrontés à son immensité.
Au fil du chemin, les chênes et les hêtres dominent le paysage, accompagnés par le charme, prisé pour son bois dense et résistant.
Ici, nous suivons la Route forestière du Val aux Chiens. Le chemin, large et rectiligne, contraste avec les sentiers plus sinueux que nous avons traversés auparavant. Cette portion offre une immersion profonde dans le cœur du massif, où la forêt semble s’étendre à perte de vue.
Puis nous replongeons un court moment dans la forêt pour rejoindre la route des Italiens. Ce nom évoque l’histoire des ouvriers italiens venus travailler dans la région au XIXè siècle.
Leur contribution fut essentielle, notamment dans les Salines royales d’Arc-et-Senans, où ils participèrent à l’exploitation et au transport du bois nécessaire aux fours à sel.
Ensuite, pendant 2 kilomètres, nous traversons la Réserve biologique dirigée de la Vallée de la Clauge. Classée Zone naturelle d’intérêt écologique, elle préserve des milieux humides précieux pour la biodiversité locale. Ici, la végétation s’adapte aux sols gorgés d’eau, offrant un paysage contrasté au cœur de la forêt.
Nous passons sous le pont du chemin de fer Dijon - Vallorbe. Derrière le talus, La Vieille-Loye se dévoile, nichée dans une clairière insoupçonnée, seul village inscrit dans les 22.000 hectares de la forêt.
Ce lieu trouve son origine au XIè siècle, lorsque les moines bénédictins de Saint-Bénigne de Dijon s’y installèrent. Plus tard, les charbonniers prirent le relais, transformant le bois en charbon pour alimenter les forges et les salines environnantes.
En 1506, Marguerite d'Autriche y autorise l'installation d'une verrerie qui passe pour être l'une des plus anciennes de France.
Il n’est que 11 heures quand j’arrive devant la mairie de La Vieille-Loye. La pluie ne cesse de tomber ; je me réfugie sous l’abribus et casse la croûte en espérant que le temps se calme un peu.
D’ailleurs, pour ceux que les 30 kilomètres de l’étape pourraient décourager, on est ici à mi-parcours, et on peut trouver un hébergement dans le village.
...
Enfin, sur le coup de midi, la pluie s'interrompt ! Je me remets en route vers le nord-est par la rue des Turots et la route du Sud. Ce n'est pas pour autant que le soleil revient !
Nous retournons en forêt.
Entre 1700 et 1840, la Forêt domaniale de Chaux a fourni à la marine royale le bois nécessaire à la construction de ses navires. Les chênes, soigneusement sélectionnés pour leur robustesse et leur rectitude, étaient destinés aux coques, aux mâts et aux charpentes.
Une fois abattus, ces troncs étaient acheminés par flottage, descendant la Loue et le bas Doubs jusqu’au chantier naval de Toulon !
Après la Route Forestière de Marizy, je suis interpellé par le nombre d'arbres cassés ou couchés sans toutefois que notre progression ne soit réllement entravée.
Mais après la Route Forestière de Guiseul, c'est la catastrophe : des dizaines d'arbres sont cassés, couchés, déracinés... Il devient très difficile de trouver son chemin.
Qu'est-ce qui a bien pu causer ce désastre ? On sait que la forêt française est malade, notamment à cause des épisodes de sécheresse successifs. Mais est-ce la raison ici ? Je n'en ai trouvé aucune information...
La route forestière de Dubois de Patellière atteinte, il nous reste six kilomètres à parcourir en forêt. On croise encore, de temps à autre, un arbre couché en travers du chemin — surtout au début —, la boue s’invite parfois, et le tracé du GR59A a été modifié à un endroit. Mais malgré tout cela, on progresse sans trop de difficulté jusqu’au bout de cet océan de verdure.
Par ailleurs, si vous n'aimez pas le vert, évitez cette étape - il n'y a que ça ! Ah non, pardon, parfois il y aussi un peu de couleur !
Après 22 kilomètres en forêt, nous débouchons sur le territoire de la commune d’Arc-et-Senans. Jusqu’ici, nous étions dans le Jura ; nous voilà maintenant dans le Doubs.
Rue du Deffois, la forêt cède doucement la place à la campagne, sans disparaître complètement.
Rue de la Grande Vye, le massif du Jura se profile à l’horizon. Après une étape de 30 kilomètres, dont une bonne partie en forêt, sous une matinée pluvieuse, jalonnée d’obstacles et sans réel répit, je suis rassuré sur ma forme. Alors demain, quand le relief s’invitera vraiment… serai-je à la hauteur ? C’est la question qui me traverse l'esprit à cet instant précis.
Il reste à peine un kilomètre quand nous atteignons la Grande Rue, la ligne droite finale ! Tout au bout : la gare SNCF d'Arc-et-Senans.
Mais avant d’en finir, on prend encore le temps d’admirer L’Antique aux bossages, une œuvre de Bernard Jobin, et de pousser la porte de la chapelle d’Arc, érigée en 1913 grâce aux dons des paroissiens.
Première mission accomplie !
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Vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D ? C'est ici :
Appréciation du parcours :
On pourrait croire que 22 kilomètres en forêt finiraient par lasser… mais ce ne fut pas mon cas. La variété de la végétation, comme celle des chemins, rend l’ensemble plutôt agréable à parcourir.
Cette longue étape commence en beauté avec Dole et ses monuments, témoins d’un passé riche, à commencer par la maison natale de Louis Pasteur.
La distance en rebutera peut-être certains, mais, comme je l’ai mentionné plus haut, il est possible de faire étape à La Vieille-Loye. Quant aux arbres tombés en travers du chemin, s’ils compliquent parfois la progression et coûtent un peu d’énergie, on peut espérer que cette situation ne durera pas.
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Comment rejoindre cette étape ?
Cette première étape de l’Échappée Jurassienne a l’avantage de relier deux gares : Dole et Arc-et-Senans. On pourrait croire qu’il suffit de loger près de l’une d’elles et de prendre le train au début ou à la fin du parcours. Mais ce serait trop simple…
Certes, une ligne de chemin de fer relie bien Dole à Arc-et-Senans, mais à l’heure où j’écris ces lignes, les trains y sont aussi rares que les cheveux sur mon crâne !
La solution la plus pratique que j’ai trouvée : loger à Besançon. La ville est très bien connectée en train, aussi bien au départ qu’à l’arrivée de cette étape.
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Vous souhaitez parcourir cette étape de l'Echappée Jurassienne ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi :