27 Avril 2023
En quittant Pavia pour Santa Cristina e Bissone, nous continuons notre périple sur la Via Francigena vers l'est de la Plaine du Pô. Une étape assez longue aujourd'hui puisqu'un peu plus de 28 kilomètres nous attendent.
Si les jours précédents nous évoluions dans la Lomellina, cette fois nous partons à la découverte du Pavese, la seconde des trois zones qui composent la province de Pavia. La troisième étant l'Oltrepò Pavese.
Si nous n'aurons plus affaire à un relief uniformément plat, il ne faut toutefois pas s'y tromper, le Pavese est aussi plat que la Lomellina. C'est juste qu'aujourd'hui nous allons jongler avec la bordure de la terrasse alluviale (*) dominant le Pô.
Enfin, je dois vous préciser que la carte ci-dessous ne correspond pas entièrement au tracé officiel de la Via Francigena. Je vous en parle plus loin.
(*) voir explication dans le récit du 26 avril 2023.
Il est déjà 9 heures 40 quand nous nous élançons sur le Corso Giuseppe Garibaldi, vers l'est donc. Nous avançons rapidement sans trop nous soucier des différentes églises croisées sur notre chemin.
J'en ai dénombré vingt-et-une à Pavia, nous ne pouvons toutes les visiter ! Et c'est sans compter les autres monuments...
Dans le prolongement du Corso Garibaldi, Viale Partigiani, nous croisons le Naviglio Pavese dont je vous ai parlé hier en toute fin d'article.
Son confluent avec le Tessin se situe moins d'un kilomètre au sud d'ici.
Un peu plus loin, nous trouvons sur notre chemin la chiesa Santa Maria delle Grazie, aussi connue sous le nom de chiesa Santa Teresa, du nom du quartier de Pavia où elle se situe.
Sa façade n'est pas belle et ça peut s'expliquer par le fait qu'elle est inachevée bien que sa construction ait débuté en 1609 ! À l'origine, elle était adossée à un couvent de carmélites qui possédait un grand cloître.
Tout disparut en 1799. Seule l'église fut préservée pour servir d'écurie, puis d'usine de salpêtre !
Alors qu'elle devait finalement être démolie, l'évêque la racheta en 1824 et la rouvrit au culte.
L'intérieur, riche en stucs et en fresques, est lumineux et affiche plusieurs œuvres d'artistes italiens.
Viale Montegrappa, nous passons cette fois devant la chiesa San Pietro Apostolo.
L'édifice actuel date du XI-XIIè siècle et était à l'origine de style roman. Mais les Cisterciens, entre 1500 et 1700, lui ont apporté de nombreuses modifications, dissimulant ses éléments romans.
Depuis sa dernière rénovation, en 1996, sa façade a retrouvé un style Renaissance.
Depuis le départ de l'étape, nous marchons tout droit vers l'est. C'est seulement au bout de deux kilomètres et demi que nous quittons l'artère principale pour emprunter une rue quasi parallèle, la Via Francana.
Là, nous découvrons la chiesa di San Lazzaro. Cette petite église semblera sans doute anodine au passant non-averti mais nous sommes ici en présence d'un des édifices majeurs de Pavia.
Existante depuis au moins 1157, l'église se trouvait déjà à l'époque sur l'itinéraire historique de la Via Francigena. Dotée d'un hôpital, elle était destinée à soigner les pèlerins de passage et les lépreux.
L'ensemble fut gravement endommagé lors du siège de Pavie, en 1525, les troupes de François Ier, roi de France, occupant les lieux.
L'église est un exemple unique d'art roman lombard. À l'intérieur, on peut encore observer des fragments de fresques datant de la première moitié du XIIIè siècle. Quand elle est ouverte, ce qui n'était pas le cas ce matin...
Nous poursuivons sur la Via Francana. Au bout de celle-ci, après un peu plus de trois kilomètres de marche, nous quittons enfin l'agglomération de Pavia. La route asphaltée disparaît au profit d'un beau chemin de campagne.
Oh, ce n'est qu'un court intermède de 800 mètres puisque nous remontons vers le quartier de Montebolone. Mais c'est déjà ça de pris !
Nous ne rentrons pas dans Montebolone. Immédiatement, nous repartons dans les campagnes par une petite route piétonnière. C'est aussi joli que court.
Cinq cents mètres en fait sur les deux kilomètres qui nous amènent à un immense rond-point sur la Strada Statale 617.
À la sortie du rond-point, en direction de San Leonardo, nous sommes interpelés par un panneau accroché à un poteau. Il nous est proposé d'emprunter une variante par Vaccarizza. Le souci, c'est qu'elle n'a rien d'officiel...
Nous avons encore le temps d'aviser...
Jusque San Leonardo, nous suivons la Viale Fratelli Cervi. Heureusement, un trottoir borde la route.
Le hameau de San Leonardo a une particularité plutôt étonnante. Il est rattaché à la fois aux communes de Valle Salimbene et de Linarolo ! Son église est dédiée à Saint-Léonard de Limoges.
Cette fois, il nous faut prendre une décision : variante ou pas ? C'est l'examen de la carte qui motivera notre décision.
L'itinéraire officiel de la Via francigena nous fait continuer tout droit et rejoindre San Giacomo par des routes asphaltées uniquement. La variante propose, elle, après Vaccarizza, un passage par le Parco Ticino et ses chemins de campagne.
Le choix est fait, ce sera donc la variante !
En empruntant la Via Ponte Strella depuis San Leonardo, nous marchons droit en direction du confluent entre le Tessin et le Pô. Sans toutefois pouvoir l'apercevoir puisque nous bifurquons en direction de Vaccarizza avant d'y arriver...
À la sortie de Vaccarizza, Franci a installé une petite halte pour le pèlerin. C'est lui qui propose cette variante. Son initiative est finalement sympathique, le personnage bien plus encore, d'ailleurs !
Il peut aussi tamponner votre credencial, si vous le souhaitez. Nous ne manquons pas de le faire.
Après une pause de quelques minutes avec Franci, nous ne tardons pas à découvrir le Parco Ticino à Vaccarizza. Ces trois kilomètres à l'extrémité est du parc valent absolument la peine même si cette partie n'est pas aussi belle qu'à l'ouest de Pavia.
Peut-être aurait-ce été différent si nous avions pu avoir une vue dégagée sur le Pô et sa confluence avec le Tessin. Mais la végétation nous aura empêché de nous en approcher et nous devrons nous contenter de cette vue encombrée.
Nous récupérons l'itinéraire officiel de la Via Francigena peu avant San Giacomo, un hameau de Belgioioso.
Au centre de celui-ci se dresse la petite église San Giacomo della Cerreta. Datant de la même époque que la chiesa di San Lazzaro, à Pavia, elle était comme elle adossée à un hôpital et se trouvait aussi sur le parcours historique de la Via Francigena.
De style roman lombard, on y trouve de nombreuses références à Saint-Jacques et notamment, au travers de la coquille qui lui est associée, au pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle.
À proximité de l'église, une aire de repos est proposée aux pèlerins, où il est même possible de recharger son smartphone !
Nos pas nous emmènent ensuite vers Santa Margherita, un autre hameau de Belgioioso. Les véhicules ne se pressent pas sur la petite route de campagne, à notre grande satisfaction.
Il n'y a pas grand-chose à dire sur le hameau de Santa Margherita sauf...
... que nous faisons une découverte ! Oh, ça ne va pas révolutionner le monde !
Deux radars sont positionnés le long de la Via Molino, dans la descente vers le Pô et, à y regarder de près, ils sont tous les deux factices !
Au vu de l'attitude des chauffards italiens, serait-ce le cas partout ? Déjà dans le bus qui m'amenait au départ de l'étape du 18 avril, à Ivrea, le chauffeur m'avait dit qu'il ne fallait pas prêter attention à ces radars...
Bon, vous, là, ce n'est pas une raison pour appuyer sur le champignon, hein !
Nous quittons Santa Margherita à allure raisonnable, je tiens à le préciser, vers Belgioioso. Au passage, à la sortie du hameau, nous découvrons un système sensé éviter les inondations en cas de crue du Pô.
Nous ne ferons qu'une brève incursion dans Belgioioso. Cette petite ville possède cependant un château intéressant qui fut à l'origine la propriété de Galeazzo II Visconti, seigneur de Pavie au XIVè siècle.
Comme notre chemin est encore long - nous venons à peine de passer la mi-parcours - et que le temps risque de nous manquer, nous faisons l'impasse sur le détour par le château.
Nous enchaînons donc directement en direction de Torre de' Negri par la Via Belgioioso.
Si nous bénéficions au départ d'une voie réservée aux piétons et cyclistes, bizarrement celle-ci disparaît dès les premières habitations de Torre de' Negri ! Plus rien, nada ! Pas de trottoir, comme dans la grande majorité des villages italiens traversés jusqu'ici.
Heureusement que certains habitants tentent de nous divertir !
Nous continuons ainsi sur la Via Belgioioso/Strada Provinciale 9 pendant trois kilomètres en direction de Sostegno...
Nous n'irons toutefois pas jusque Sostegno. Bien avant d'y arriver, nous bifurquons à gauche pour traverser la Cascina Campobello. Dois-je vous préciser que nous sommes heureux de retrouver un beau chemin de campagne ?
Après la ferme, nous traversons la Strada Provinciale 199 pour rejoindre une carrière de sable. Nous la contournons par le nord sur un superbe chemin qui la domine.
On peut aussi observer, à l'est de la carrière, une ferme solaire !
Au bout d'un superbe parcours de deux kilomètres, nous atteignons la rivière Olona. L'Olona méridionale ou Olona inférieure, pour être précis.
Il existe une grande analogie entre l'Olona et le Terdoppio, que nous avions croisé le 25 avril, entre Gambolò et Gropello Cairoli. En effet, comme le Terdoppio, le cours de l'Olona fut coupé en deux par les Romains, la partie nord étant déviée vers Milan.
L'Olona méridionale n'a donc pour ainsi dire pas de source puisque ce sont des canaux d'irrigation qui l'alimentent. Et elle termine son parcours dans le Pô, à San Zenone al Po, à quatre kilomètres au sud d'ici.
Pour rejoindre Costa de' Nobili, c'est donc l'Olona que nous... ne suivons pas ! Eh non !
En fait, l'écluse sur l'Olona que nous venons de franchir donne naissance à un canal d'irrigation, la Roggia Campana. C'est ce canal que nous suivons jusque Costa de' Nobili.
Pour le plus grand plaisir des yeux !
Nous avons vite fait de traverser le village de Costa de' Nobili qui ne présente guère d'intérêt...
... pour nous engager dans la plaine le séparant de Santa Cristina e Bissone. Trois kilomètres et demi d'un beau chemin de campagne dans un décor que nous commençons à ne connaître que trop bien...
Pour nous, Santa Cristina e Bissone n'a d'intérêt que sa gare qui va nous permettre de rentrer en train sur Pavia.
Pour vous, à moins que vous ne preniez aussi le train, il n'y en aura guère plus depuis que le monastère de Santa Cristina a disparu en 1654...
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Vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D ? C'est ici :
Appréciation du parcours :
Cela fait maintenant sept jours que nous parcourons la Via Francigena dans la plaine du Pô et une certaine lassitude commence à s'installer. Est-ce la fatigue physique qui s'accumule ou le fait d'évoluer chaque jour dans le même environnement ? Un peu des deux, sans doute.
Sinon, concrètement ? Sur les 29 kilomètres parcourus, 18 l'ont été le long de routes. Pas très fréquentées, certes. Les 11 kilomètres restants se sont, eux, déroulés sur de très beaux chemins de campagne. Est-ce suffisant pour pouvoir dire que c'était quand même une belle étape ? À vous de juger.
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Comment rejoindre cette étape ?
Depuis deux jours, nous logeons à Pavia et la Via Francigena passe par la gare de Santa Cristina e Bissone, sur la ligne Pavia - Crémone. Quoi de plus facile donc que de revenir en train en fin d'étape ?
Pavia recèle de tellement de monuments qu'il est intéressant d'y séjourner plusieurs nuits. Cela permet, chaque jour, au retour de randonnée et si on en a encore le temps et le courage, de visiter cette magnifique cité.
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Pavie ou Pavia ?
Vous aurez sûrement remarqué que, la plupart du temps, je nomme Pavie par son nom italien, Pavia. Pourquoi ?
Je pourrais répondre qu'après tout, c'est pareil que pour les autres villes traversées. Mais il y une autre raison. Certes, c'est une anecdote, mais elle pourrait vous faire économiser de l'argent. Beaucoup d'argent !
Lors d'un autre séjour dans la région, avec ma compagne, nous logions à Pavia. Un jour, nous partons en train visiter Milan(o). Au retour, un orage fait tomber des arbres sur la voie, le train est arrêté et nous n'avons d'autre choix que de prendre un Uber pour rentrer à Pavia.
Mais nous avons écrit Pavie comme destination dans l'application. Or, il se fait qu'il existe un Pavie, en italien, non loin de Pavia mais suffisamment pour que le détour malencontreux que nous avons fait nous coûte... 160 euros !
Et ça aurait pu nous coûter plus cher encore si nous ne nous étions pas rendu compte en cours de route que nous n'allions pas dans la bonne direction !
La Certosa di Pavia, un monument exceptionnel !
Je vous avais promis hier de vous parler d'un monument exceptionnel. Il s'agit de la Certosa di Pavia. La Chartreuse de Pavie, en français.
Ce monastère de Chartreux, de style gothique tardif, fut construit à huit kilomètres au nord de Pavie, le long de la route de Milan et à l'extrémité du parc aujourd'hui disparu du château des Visconti dont je vous ai parlé dans mon récit d'hier.
Je ne vais pas vous raconter l'histoire de ce monument exceptionnel mais je vais juste relever deux anecdotes. La construction de la Chartreuse a débuté en 1396 et l'église fut consacrée en 1497. Il fallut donc un siècle exactement pour ériger cet ensemble monastique.
Autre anecdote. La façade de l'église est faite de marbre de Carrare. Si je peux faire un (mauvais ?) jeu de mot, je dirais même que c'était un cas rare dans la région tant le transport de ce marbre exceptionnel était compliqué et cher, à l'époque.
Mais les Chartreux ne manquaient pas de moyens financiers et ils firent venir le marbre par bateau. Partant de Carrare, sur la Méditerranée, il faisait le tour de l'Italie, longeait la côte Adriatique pour ensuite parvenir à Pavia en remontant le Pô !
Je n'ai qu'un conseil à vous donner, allez la visiter si vous avez un certain intérêt pour le patrimoine. La visite guidée est gratuite mais les photos à l'intérieur du monastère sont en principe interdites.
Vous trouverez ci-dessous le lien vers le site de la Certosa et, plus bas, quelques photos personnelles. Mais encore une fois, rien ne vaut une visite sur place !
Cathedral (English Version) - Certosa di Pavia
It is certainly thanks to the Duke's financial support that in 1400 the prior of the Certosa was able to spend 1,000 gold florins to commission a true masterpiece to Baldassarre degli Embriachi: a ...
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Vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi :