21 avril 2023 - La Via Francigena de Vercelli à Robbio

Alors que le jour se lève sur le Lago di Viverone d'où nous déménageons ce matin pour aller prendre nos nouveaux quartiers près de Mortara, un déluge de pluie s'abat sur la région ! Du jamais vu ici selon la propriétaire de notre chalet !

Si la situation s'améliore bien comme prévu cet après-midi, c'est un moindre mal, car l'étape d'aujourd'hui est courte - 18,5 kilomètres entre Vercelli et Robbio - et nous avons prévu de passer chez Décathlon à Vercelli avant de nous lancer à pied sur la Via Francigena.

En effet, Kévin randonne avec mes baskets de ville depuis deux jours, ses chaussures de randonnée ayant rendu l'âme, et les miennes me détruisent les talons.

Après être passés par l'Office de Tourisme de Vercelli pour y faire tamponner nos credencials, et la météo s'étant calmée, nous sommes finalement à pied d'œuvre peu avant 14 heures sur la Piazza Camillo Benso Conte di Cavour.

De forme trapézoïdale, c'est la place principale et depuis huit siècles la plus importante de Vercelli. Le saint Suaire fut exposé ici en 1560, c'est dire.

En son centre trône le monument à Camillo Benso, dit Cavour (1810 - 1861). Homme d'état très engagé, défenseur du libre-échange, il est le principal promoteur de la culture du riz à Vercelli. Vous le savez depuis mon récit d'hier, on lui doit la construction du Canale Cavour (voir récit du 20 avril 2023).

De la place, nous pouvons aussi apercevoir la Torre dell'Angelo (en briques rouges avec de larges ouvertures, sur la première photo ci-dessous). Erigée entre la fin du XIVè et le XVè siècle, elle est un des emblèmes de la ville.

De la place, nous rejoignons le Corso Libertà que nous empruntons vers l'est. Nous passons devant la chiesa di San Lorenzo (XVIIIè siècle), une des innombrables églises de Vercelli.

Continuons notre périple dans cette superbe ville.

Cinquante mètres après la chiesa di San Lorenzo, une belle façade couleur pierre dont le pourtour des ouvertures est peint en marron retiendra peut-être votre attention.

En tout cas, elle devrait ! Il s'agit du palazzo Centori, le plus beau bâtiment de style Renaissance de Vercelli. Apparemment il ne se visite qu'à certaines occasions et l'accès est limité à sa cour intérieure. Dommage...

Un peu plus loin, nous arrivons à la Piazza dei Tizzoni. Avec sa tour octogonale, le Palazzo dei Tizzoni (XVè siècle) est un autre des plus beaux palais de Vercelli.

Au bout de la rue, nous apercevons la chiesa parrocchiale di Sant'Agnese.

Terminons l'inventaire du Corso Libertà par la Chiesa di Santa Chiara.

Cette église du XVIIIè siècle, aujourd'hui espace d'exposition, fait partie d'un complexe monastique des Clarisses qui abrite dorénavant l'Ecole municipale de musique de Vallotti et le Musée archéologique de la ville de Vercelli "Luigi Bruzza".

Sortis du Corso Libertà, nous ne nous attarderons pas au-dessus du Colatore Cervetto. Ce n'est rien d'autre qu'un égout à ciel ouvert qui fait régulièrement la une de l'actualité pour ses pollutions récurrentes, exacerbées par les sécheresses de plus en plus fréquentes.

Quatre cents mètres plus loin, nous serons plus intéressés par la Sesia. Long de 140 kilomètres, cet affluent du Pô est une des plus longues rivières du Piémont.

Comme mentionné dans mon récit d'hier, la Sesia reçoit les eaux excédentaires du Naviglio di Ivrea à hauteur de Vercelli et, grâce à un pont-siphon, passe au-dessus du canale Cavour (voir récit du 20 avril 2023).

Du pont de la Sesia, nous suivons la Strada Provinciale 11bis pendant 700 mètres avant de bifurquer à droite dans un chemin de campagne qui nous amène à la digue de la Sesia au bout de deux kilomètres.

Prenant sa source au Mont Rose, à environ 2.500 mètres d'altitude, la rivière connaît un débit fortement influencé par les précipitations. Il peut passer de 70 m3/sec à 6.000 m3/sec !

Ainsi, parmi d'autres exemples, en octobre 2020, des ponts furent détruits et plusieurs villages de la vallée furent inondés, à l'instar d'une partie de Vercelli et de la ligne de chemin de fer Milan - Turin ! Sans compter les étendues de champs ravagées par les eaux.

Voilà la raison d'être de ces digues.

Nous sommes maintenant partis pour un peu plus de six kilomètres sur la digue, en rive gauche de la Sesia ! Situés en hauteur par rapport à la campagne environnante, nous bénéficions d'une position privilégiée.

On pourrait craindre de s'y ennuyer mais les distractions ne manquent pas, comme le passage sous l'autoroute A26...

... ou un canal d'irrigation, une rizière, un passage arboré, une ferme en ruines... Bon, je ne vais pas vous faire toute la liste sinon c'est moi que vous trouverez ennuyeux...

Entre-temps nous aurons quitté Vercelli pour Palestro, mais ça c'est transparent. De la même manière que nous sommes maintenant en Lombardie, dans la province de Pavie.

Un peu après la mi-parcours, nous arrivons à la fin de la digue et nous descendons vers le Cavo Crocettone...

... que nous devons traverser.

Mais ! Caramba ! Le pont est endommagé et une chaîne et des blocs de béton en barrent l'accès !

Bon, ce n'est pas clair si nous pouvons ou pas le franchir à pied alors, dans le doute, on ne s'abstient pas. Ah ? Ce n'est pas ainsi que ça va ? Tant pis, de toute façon nous sommes déjà passés.

Ne croyez cependant pas que l'affaire soit anecdotique. Même la presse nationale italienne s'est emparée du problème ! Rendez-vous compte, un pont sur la Via Francigena inaccessible aux pèlerins !

En fait, la propriété du pont n'est pas clairement établie et, dans ce cas, qui donc doit prendre en charge sa réfection ? Par précaution, le maire de Palestro a pris un arrêté d'interdiction, contesté par les associations touristiques.

Il semblerait bien que la résolution du problème coûte plus cher en avocats que les quelques planches à remplacer...

Après ce moment de flottement, nous arrivons à Palestro. Par la même occasion, nous entrons dans la Lomellina. Cette région correspond à la partie ouest de la Lombardie.

Bien que toujours située dans la plaine du Pô, elle était caractérisée dans le passé par d'énormes étendues de forêts, lieux de prédilection pour les chasseurs, dont parmi eux les seigneurs de Milan.

Le relief bosselé était aussi source de biodiversité. Alors que les sommets des bosses étaient boisés, les creux étaient humides, fournissant l'habitat pour une faune très riche.

C'est ainsi que, encore aujourd'hui par exemple, on rencontre dans la Lomellina les neuf espèces de hérons européens, dont sept sont endémiques.

Le paysage, lui, a quelque peu changé sous l'action de l'homme. Des forêts entières ont été rasées et des bosses arasées pour combler les creux. Au profit de quoi ? Mais de la culture du riz, pardi !

Bon, heureusement, la préservation de la nature est restée une priorité majeure et la région offre toujours un grand intérêt environnemental.

Parler de l'histoire de Palestro ici en quelques mots est chose impossible tant elle fut agitée à cause de sa position sur un axe de communication important. Après tout, le passage de la Via Francigena n'en est-il pas une bonne preuve ?

Mais nous pouvons quand même retenir de son histoire la bataille de Palestro qui se déroula ici les 30 et 31 mai 1859 lors de la deuxième guerre d'indépendance italienne. Ce fut alors la première victoire des troupes franco-piémontaises sur l'armée autrichienne.

Un ossuaire, construit en 1893, recueille les dépouilles des soldats morts au combat. Il est visible à l'entrée ouest de la ville et se trouve donc hélas assez éloigné du parcours de la Via Francigena.

Cependant nous passons à proximité de la Torre dei Visconti, seul vestige du château féodal, propriété des Borromée, une importante famille de la noblesse milanaise dont l'histoire remonte au XIIIè siècle.

Allez, vous voulez un petit potin mondain ? La petite dernière de la famille, Beatrice Borromeo, s'est mariée en 2015 avec le fils de la princesse Caroline de Monaco, Pierre Casiraghi...

Nous quittons Palestro en longeant le Cavo Scotti, un de ces nombreux canaux d'irrigation qui traversent la région. Au bout de 800 mètres, il passe sous le Roggia Gamarra Manufatta, nous donnant ainsi l'occasion de voir de près un pont-siphon.

Le Roggia Gamarra Manufatta est un autre canal d'irrigation, très ancien. Sa construction est antérieure à l'année 1182 !

En fait, la zone entre Palestro et Robbio est un formidable enchevêtrement de canaux qui courent dans tous les sens, se croisent et se recroisent...

Aussi, si nous retrouvons un temps le Cavo Scotti, pendant trois kilomètres et demi jusqu'à la SP21, nous passons d'un canal à l'autre - le Cavo di San Pietro et le Cavo di Rivoltella pour ne citer que les deux plus importants.

Nous empruntons la SP21 sur un kilomètre pour rejoindre l'entrée de Robbio. Nous avons arrêté de compter les canaux !

Pour rejoindre l'arrivée de l'étape, à la petite église San Pietro (XIIè siècle), nous empruntons la Via Rosasco et, dans son prolongement, la Via Cernaia.

À part la Chiesa di San Valeriano, Via Rosasco, rien n'aura particulièrement attiré notre regard. 

Ici se termine l'étape du jour.

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Vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D ? Ça se passe ci-dessous :

Appréciation du parcours :

En 1875, visitant Toulouse inondée, le maréchal Mac-Mahon, alors Président de la République, s'était exclamé "Que d'eau ! Que d'eau !". Nous pourrions dire pareil de la seconde moitié de cette étape tant le parcours est jalonné de canaux emplis d'eau !

Quant à la première partie, en plus de la découverte de la superbe ville de Vercelli, elle est avant tout remarquable par son cheminement sur la digue de la Sesia qui nous offre une vue imprenable sur la campagne environnante.

Voilà en tout cas une étape qui nous aura proposé un programme totalement différent des jours précédents. Mais qui donc a dit qu'on s'ennuyait dans la plaine du Pô ?

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Vercelli

À votre avis, si vous demandiez à votre entourage qui connaît Vercelli - Verceil, en français -, combien répondraient par l'affirmative ? Très peu, voire aucun, je pense.

Et pourtant la capitale de la province éponyme est un réel petit bijou proposant de nombreux monuments et édifices remarquables, héritage d'une histoire riche !

Je n'ai pas (encore) visité toute la ville mais je vais vous montrer ce que nous avons découvert sur le trajet entre la gare et la Piazza Camillo Benso Conte di Cavour.

Partant de la gare, nous empruntons la Via Galileo Ferraris. Un peu d'histoire s'impose pour bien comprendre d'où vient la richesse de cette ville qui mérite une visite.

À l'époque romaine déjà, Vercelli était un carrefour routier important. Mais c'est au IVè siècle, sous l'impulsion d'Eusèbe, que la ville prend son essor. Le premier diocèse de la région est créé et la ville devient le centre de propagation du christianisme.

Au Moyen Âge, Vercelli connaît une période de grande splendeur artistique et culturelle.

Ainsi, de 1219 à 1227, fut élevée la remarquable basilique Sant'Andrea que nous découvrons maintenant. Elle fait partie de l'abbaye, symbole et plus célèbre monument de Vercelli.

Un des tout premiers édifices gothiques érigés au sud des Alpes, elle mêle subtilement le gothique au style roman lombard.

Face à la basilique se trouve le Département des sciences humaines de l'Université du Piémont oriental créée en 1998 avec Alexandrie et Novara.

En 1228 était installée à Vercelli la première université du Piémont. Son existence ne dura toutefois qu'un siècle.

De la fin du Moyen Âge à la Révolution française, soit à l'époque moderne, la culture du riz devient la base de l'économie locale. Elle prend tant d'ampleur que Vercelli devient capitale italienne et européenne du riz !

Remontant la Via Galileo Ferraris, nous arrivons devant l'ARCA. Derrière cette façade se cache l'ancienne église gothique de San Marco.

Construite à partir du XIIIè siècle, elle était attenante à un couvent des ermites de Saint-Augustin. Fermée à la Révolution française, elle connut depuis de multiples usages dont celui d'abri pour la cavalerie.

De 1883 à 2001, elle servit de marché des fruits et légumes couvert. Aujourd'hui, c'est un espace d'exposition.

Face à l'ARCA, se trouve l'église San Bernardo.

Il s'agit du plus ancien édifice religieux de Vercelli, construit entre 1151 et 1168 dans le style roman. On y voue un culte très populaire à Notre-Dame des Malades qui, selon la tradition, aurait libéré la population de la peste en 1630.

Ce n'est qu'une infime partie de tous les trésors dont recèle Vercelli. On peut encore citer le Duomo, dont la construction a duré de la fin du IVè siècle à... 1860 !

Puis il y a les nombreux palais, tours, places, musées... Et les vestiges de l'amphithéâtre romain datant du I-IIè siècle après JC. Il aurait été l'un des plus grands amphithéâtres au monde !

Bref, une visite de Vercelli s'impose, si vous passez dans la région.

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Comment rejoindre cette étape ?

Capitale de la province éponyme, Vercelli est bien desservie tant par la route que par les transports en commun.

Elle est ainsi proche des autoroutes A26 et A26/A4 et est le carrefour de plusieurs routes nationales et provinciales.

Elle est aussi directement reliée par voie ferrée à Milan, Turin, Pavie et Biella. Un réseau de bus urbains et de banlieue ainsi qu'un service de vélos en libre-service complètent le dispositif.

Pour cette étape, nous avons laissé la voiture à Robbio, sur le parking de la gare (gratuit), et avons rejoint Vercelli en train. Il n'y a pas de distributeur de billets à la gare, il faut aller les acheter dans une petite épicerie, Corso Amedeo d'Aosta, la rue qui conduit à la gare.

Sinon, on peut acheter ses billets sur l'application Trainline mais personnellement je n'ai pas réussi à y enregistrer ma carte de paiement. Quoiqu'il en soit, cette application est intéressante pour consulter les horaires des trains et planifier son voyage.

Sur la ligne Vercelli - Pavie, Trenord met en œuvre des autorails FS ALn 668 de la série 1000. Construits entre 1975 et 1979, ils sont motorisés par un moteur FIAT et possèdent une boîte de vitesses mécanique, comme sur une voiture ! Expérience à vivre !

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Vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi.