14 Septembre 2023
Les premières étapes de cette session estivale sur la Via Francigena demandent quand même une excellente condition physique. Car, après les 26 kilomètres d'hier, ce ne sont pas moins de 30 kilomètres qui nous attendent aujourd'hui entre Piacenza et Fiorenzuola d'Arda !
A part la distance, aucune difficulté particulière n'est toutefois à craindre. Nous sillonnerons toujours la plaine du Pô.
Il ne faut pas non plus espérer monts et merveilles de cette étape. Je me suis laissé dire hier, par quelqu'un de très bien informé, que les pires étapes de la Via Francigena se trouvaient en Emilie-Romagne !
Et si nous allions nous en rendre compte par nous-mêmes ?
Je suis à l'œuvre à Piacenza à 7 heures du matin. Comme je n'y reviendrai pas à l'issue de l'étape, je fais un petit tour de la ville avant de rejoindre la Via Francigena.
Venant de la gare, je rejoins d'abord les Giardini Margherita à l'entrée desquels trône une superbe statue de Giuseppe Garibaldi. Les jardins, eux, doivent leur nom à la reine Marguerite de Savoie en l'honneur de qui ils sont nommés après leur achat par la municipalité en 1893.
Plus loin, au bout des Giardini Merluzzo, Via Roma, je suis impressionné par la façade du Palazzo Anguissola di Grazzano.
Sur ce palais de 1777 plutôt austère, on s'amusera à observer les frontons au-dessus des fenêtres, différents d'un étage à l'autre. Et les petites fenêtres rondes logées tout en haut sous la corniche dorique. Les architectes avaient visiblement envie de s'amuser !
En route maintenant pour le Duomo, la Cattedrale Santa Maria Assunta e Santa Giustina de son vrai nom. Evidemment, à cette heure si matinale, je trouve portes closes.
L'édifice fut construit en deux temps, expliquant le mélange de deux styles, le roman et le gothique. Les historiens ne sont pas tout à fait d'accord entre eux alors retenons que la première partie de la construction daterait de la première moitié du XIIè siècle, tandis que la seconde se situerait un siècle plus tard.
La cathédrale se trouve logiquement sur la très belle Piazza Duomo, à côté du Palazzo Vescovile. Ce dernier est le siège de l'épiscopat et fut construit entre 1534 et 1549 à l'emplacement de l'église San Giovanni de Domo qui datait du VIIIè siècle.
Pendant quatre siècles, l'église et la cathédrale se sont donc côtoyées !
Hier était jour de marché sur la Piazza dei Cavalli. Un petit retour sur les lieux s'impose donc afin de tirer quelques photos libres de tout étal.
Je vous invite à relire le récit de l'étape d'hier pour y trouver le détail des divers édifices qui entourent la place. Seule la Basilica di San Francesco d'Assisi ne s'y trouve pas.
Construite entre 1278 et 1363, elle faisait partie d'un ensemble monastique comprenant trois cloîtres. Mais, à l'exception de la basilique et d'un portique, tout fut détruit en 1942 par la municipalité.
Il est temps de retrouver la chiesa San Donnino pour prendre le départ de cette deuxième étape sur la Via Francigena.
Nous empruntons la Via Sant'Antonino en direction du sud-est. Et que trouve-t'on dans cette rue ? La basilica Sant'Antonino, pardi !
Construit en style roman entre 350 et 375, le premier édifice se trouvait alors hors des murs de la ville. Il joua pourtant le rôle de cathédrale de 400, quand on y amena les reliques de Saint Antonin, jusqu'en 850.
Par la suite, bien qu'elle ait perdu de son importance, elle subit de nombreuses transformations à travers les siècles pour devenir ce qu'elle est maintenant.
Personnellement, je la trouve superbe avec sa tour octogonale et l'immense porche de sa façade nord surmonté de tourelles.
Nous poursuivons cette fois dans la Via Gianbattista Scalabrini où s'enchaînent les églises ! Trois, exactement.
La première est l'ancienne église San Vincenzo du XIIIè siècle, ayant appartenu à l'Ordre des Théatins. Aujourd'hui propriété de la municipalité, connue sous le titre de Sala dei Teatini, c'est un auditorium musical à la pointe de la technologie mais dans laquelle ont été restaurées les magnifiques fresques du XVIIè siècle.
Vient ensuite la chiesa San Paolo, un édifice baroque du XVIIè siècle. Si sa façade est d'allure simple, l'intérieur renferme de nombreuses œuvres remarquables.
La chiesa di Sant'Anna termine la série. Rebâtie en 1334 sur les vestiges d'une église du XIIè siècle, elle abrite une statue en bois de San Rocco réalisée en 1534.
Plus loin, Piazzale Roma, nous découvrons le monument à la louve, symbole de Rome, avec Romulus et Remus. Il se situe à l'emplacement de l'ancienne porte de la ville d'où part toujours la route menant à Rome.
L'œuvre de 1938 commémore la proclamation de Victor-Emmanuel III comme empereur d'Ethiopie.
A partir de là, nous quittons le cœur historique de Piacenza et, comme dans beaucoup de grandes villes, la banlieue est tout de suite moins intéressante, comme ce quartier de Baia del Re que nous traversons.
Prenant mon petit-déjeuner dans un petit parc, Via Carlo Barbieri, je fais connaissance pour la deuxième fois en deux jours avec les moustiques-tigres !
Les 3,8 kilomètres qui suivent nous emmènent à travers une banlieue industrielle de Piacenza, le long de la ligne de chemin de fer Piacenza - Parma. C'est non seulement moche mais aussi extrêmement sale ! Ca n'apparaît pas sur les photos mais, croyez-moi, les abords du chemin sont un véritable dépotoir !
Quand on atteint la Via Emilia Parmense, il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que l'horreur persiste !
Il faut alors suivre cette route très fréquentée sur une étroite bande d'asphalte. Les bas-côtés sont toujours aussi pollués et, pour couronner le tout, à plusieurs reprises, des conducteurs ont fait mine de me foncer dessus, totalement inconscients du danger qu'ils représentent !
Le calvaire continue sur 1.700 mètres jusqu'à ce que, le Torrente Nure aujourd'hui à sec franchi, nous puissions enfin quitter la route !
Le Nure est, sauf erreur de ma part, le premier affluent important de la rive droite du Pô que nous traversons sur la Via Francigena. Il constitue aussi la limite entre Piacenza et Pontenure, qui tire son nom du pont sur le Nure comme vous l'imaginez sûrement.
Nous quittons donc avec le plus grand plaisir la Via Emilia Parmense par la droite pour emprunter à travers la campagne une petite route, la Strada della Misericordia. Cela reste de l'asphalte mais quel bonheur d'échapper enfin au trafic automobile !
Nous atteignons Pontenure. Un peu plus loin que la Mairie, nous découvrons la Chiesa di San Pietro Apostolo.
Il est fait mention pour la première fois de l'église paroissiale de Pontenure en 1138. Son clocher est issu d'une ancienne tour médiévale ayant eu auparavant une fonction militaire.
C'est au XVIIIè siècle qu'elle subit les plus importantes modifications, quand on lui ajouta les deux nefs latérales, le dôme, et l'abside.
Nous quittons Pontenure par la Strada di Valconasso, direction le sud. A la sortie de la ville, l'accotement est protégé par des bornes, assurant une certaine sécurité aux piétons. Par après, une voie latérale est réservée aux usagers faibles.
A mi-chemin entre Pontenure et Valconasso, un hameau, on peut observer sur la droite de la route une importante propriété constituée d'une part d'une ferme, d'autre part d'un grand bâtiment en bord de route.
Ce bâtiment, c'est la Bellotta, centre pastoral et maison de vacances du diocèse de Piacenza - Bobbio. S'il est géré par des religieux, il accueille néanmoins tout le monde, du pèlerin de la Via Francigena aux familles avec enfants, quelque soit le but du séjour.
Un kilomètre plus loin, nous découvrons la chiesa Santa Maria Assunta, en retrait par rapport à la rue principale traversant Valconasso. L'édifice date du XVè siècle et abrite des fresques des XVè et XVIè siècles.
Nous retournons dans la campagne pour, au bout de deux kilomètres de petite route asphaltée...
... découvrir le Castello di Paderna.
La présence d'une fortification était déjà mentionnée ici à l'époque romaine. Puis on trouve trace d'un château médiéval dans des écrits de 817 et 900.
Jusque 1453, pendant quatre siècles, le château appartient au monastère de San Savino, à Piacenza. Son nouveau propriétaire le transforme alors en exploitation agricole et en résidence, lui donnant sa forme actuelle.
Bien qu'il ait depuis changé de mains, le château a conservé sa fonction, abritant aujourd'hui une ferme biologique où sont entre autres cultivées d'anciennes variétés.
Après 17 kilomètres de randonnée, nous quittons enfin l'asphalte ! C'est même Byzance quand nous prouvons profiter d'un superbe chemin de terre...
... tracé au milieu de champs de tomates !
Pendant deux kilomètres, nous bénéficions d'un agréable chemin qui nous réconcilie avec l'Emilie-Romagne. Quel dommage qu'il ait fallu attendre plus de la moitié de l'étape !
Je me suis réjoui trop vite. Arrivés sur le territoire de Carpaneto Piacentino, nous retrouvons quatre kilomètres d'asphalte. Bon, ce sont principalement de petites routes de campagne peu fréquentées, c'est un moindre mal.
Après Zappellazzo di Sotto, la traversée du Torrente Chero, à sec, et de la frange boisée qui le borde est idyllique.
Plaisir fugace toutefois même si la suite est un mélange plutôt agréable de chemins de terre et de petites routes de campagne traversant cette fois le territoire de Cadeo sur 2.600 mètres.
A la Cascina La Felina, à Fiorenzuola d'Arda, j'ai la chance de pouvoir observer la récolte des tomates et le balai bien réglé, routinier, des hommes et des machines.
Nous continuons notre périple à travers la campagne d'Emilie-Romagne...
Au bout d'un peu plus de 29 kilomètres, nous entrons enfin dans Fiorenzuola d'Arda.
Après la traversée du Torrente Arda, et être passés par la Porta Piacenza, nous arrivons rapidement à la fin de l'étape, au croisement du Corso Giuseppe Garibaldi et de la Viale della Liberazione.
La Porta Piacenza est la seule encore existante des quatre portes qui permettaient de franchir les murailles, témoignage unique de l'époque, le Moyen-Âge, où Fiorenzuola d'Arda était une grande forteresse militaire.
L'arc actuel date toutefois de 1814 et porte une inscription célébrant la fin cette même année de l'occupation napoléonienne.
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Vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D ? C'est ici :
Appréciation du parcours :
Après la visite de la superbe ville de Piacenza, cette étape tourne vite au cauchemar quand il faut traverser la banlieue puis longer la Via Emilia Parmense ! Plus de sept kilomètres à longer un véritable dépotoir et à devoir affronter un trafic automobile démentiel ! Le pire de la Via Francigena semble bien se trouver en Emilie-Romagne.
Il faut attendre Pontenure pour connaître un parcours apaisé et encore sept kilomètres supplémentaires pour enfin bénéficier d'un chemin de terre ! C'est donc seulement à mi-parcours que cette étape devient réellement intéressante.
Hâte de tourner la page et de découvrir ce que me propose demain !
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Comment rejoindre cette étape ?
Je quitte aujourd'hui mon logement à Pieve Porto Morone pour un autre, à Parme. Pourquoi Parme alors que la ville se trouve complètement à l'écart de la Via Francigena ?
Parce qu'il s'agit d'un nœud ferroviaire qui permet de rejoindre à la fois Fiorenzuola d'Arda, sur la ligne Parme - Piacenza, et Fornovo di Taro, sur la ligne Parme - Pise.
Ce matin, je suis donc allé en voiture jusque Fiorenzuola d'Arda, d'où j'ai pris le train jusqu'au départ de l'étape à Piacenza. Il y a plusieurs parkings gratuits à l'arrière de la gare, le plus proche étant celui du cimetière et accessible à pied via un passage sous-voies.
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Vous souhaitez parcourir cette étape de la Via Francigena ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi.