15 Décembre 2021
Retour ce mercredi sur la boucle 1 des Tours du Bassin minier pour la deuxième étape, entre Barlin et Marles-les-Mines.
Cette fois, je suis arrivé beaucoup plus tôt à la gare de Don-Sainghin, ce qui m'a permis de prendre le train jusqu'à Béthune. Il faut le reconnaître, c'est bien plus confortable que la voiture surtout que nous disposons d'un train immense pour seulement quelques passagers.
L'inconvénient, souvent, c'est de rejoindre le lieu de départ depuis la gare, mais ici, dans le bassin minier, le réseau Tadao est particulièrement bien développé. Ainsi, le bus 12 m'amène à l'arrêt Fosse 5 de Barlin en une quarantaine de minutes.
C'est donc parti pour une nouvelle randonnée d'une vingtaine de kilomètres qui m'est déjà bien connue puisque je l'avais parcourue, en sens inverse toutefois, le 20 septembre 2019 (non publiée sur ce blog). En effet, entre la Forêt Domaniale d'Olhain et Marles-les-Mines, la Via Francigena suit exactement le même parcours.
Nous reprenons donc la boucle 1 au carrefour entre la rue d'Hersin et la rue des Bracquenois, à Barlin, et nous suivons cette dernière en direction du sud.
Au bout de la rue, quand la route se transforme en chemin de terre, nous pouvons apercevoir sur la gauche d'anciennes installations de la Fosse n° 5 - 5 bis de la Compagnie des mines de Nœux c'est-à-dire le château d'eau, un atelier et la salle des machines d'extraction.
Les deux puits, le 5 et le 5 bis donc, distants d'une quarantaine de mètres, furent exploités de 1875 à 1951. Alors profonds respectivement de 678 et 592 mètres, ils seront rebouchés en 1952.
Nous continuons la rue des Bracquenois jusqu'au pont de l'ancien cavalier minier. Sur notre gauche, avant le pont, se trouvait le terril n° 39, 5 de Nœux (pour la dénomination des terrils, voir en fin d'article du 14 décembre 2021).
Conique à la fermeture de la fosse, alors haut de 56 mètres, il fut depuis largement exploité.
Passés sous le pont, nous bifurquons à droite pour nous engager sur l'ancien cavalier minier. Aménagé, couvert de cendrée rouge, c'est un vrai plaisir d'y marcher.
Pendant huit cents mètres, le cavalier minier longe le côté sud-est de la cité n° 9 de Barlin.
Construite au début du XXè siècle, elle abritait les familles des mineurs de la Fosse n° 9 d'Hersin-Coupigny. Des familles qui seront d'ailleurs endeuillées par un coup de grisou le 17 avril 1917, tuant 42 mineurs et en blessant 11.
Sortis de la cité n° 9, nous passons sous la Rocade Minière par la D 179E1 et nous entrons dans la Forêt Domaniale d'Olhain par un trou de souris à l'arrière du rond-point.
Le panneau indiquant l'entrée du sentier mériterait d'être dégagé de la végétation qui le dissimule.
Dans la montée vers la Route Forestière des Terrils, une route asphaltée qui traverse la forêt domaniale, un GPS se révèle nécessaire pour se diriger. Il existe plusieurs traces qui laissent penser à des sentiers et on a vite fait de se fourvoyer. Même avec le GPS.
Et ne comptez pas sur le balisage, je n'en ai pas trouvé trace. À moins que trop occupé à regarder où mettre les pieds tant le sol est boueux, il m'ait échappé.
Arrivé à la Route Forestière des Terrils, l'itinéraire de cette boucle 1 vous dirige vers la droite. Pas sur la route, non, ce serait trop facile ! Mais sur un chemin encore plus boueux qui redescend la colline vers le nord-ouest !
Conseil :
Si le sol est humide et boueux, empruntez la route vers la droite et récupérez l'itinéraire un peu plus bas. Suivre l'itinéraire prévu demande beaucoup d'efforts pour rester debout et il reste encore 17 kilomètres à parcourir, pensez-y.
Nous atteignons la lisière de la Forêt Domaniale au Champ Potier que nous longeons vers le sud-ouest.
Et, ça alors ! D'ici nous pouvons apercevoir les terrils jumeaux du Pays à Part, à Haillicourt (*). Cela signifie, pour être déjà passé ici au moins une dizaine de fois, que, contrairement à ce que j'écrivais hier, j'avais déjà vu ces terrils auparavant !
(*) Petite précision quand même : si l'accès aux terrils se fait bien par Haillicourt, rue de la Lampisterie, les terrils se situent, eux, sur le territoire de Ruitz.
Au coin du Champ Potier, nous retrouvons la Route Forestière des Terrils que nous traversons pour continuer plein sud. Ici, nous disposons de 300 mètres d'un bon chemin pour décrotter nos chaussures...
Car les habitués du lieu savent que le parc d'Olhain, en hiver, c'est un infame cloaque ! Enfin, je dis ça parce que, moi, la boue, hein...
Alors, quand il faut remettre les pieds dedans pour un nouveau 300 mètres... Et bien on prend son courage à deux mains et on y va gaiement !
Le sommet de la colline atteint, trouver son chemin se complique un peu. Un panneau indicateur en bois vous invite bien à prendre à droite mais ça s'arrête là. Après, plus la moindre indication.
C'est donc un peu au petit bonheur la chance que je rejoins le centre d'accueil du parc d'Olhain. Où on retrouve le fléchage...
Nous passons devant le centre d'accueil du parc d'Olhain pour suivre la route asphaltée qui court sur le sommet de la colline avant de redescendre vers le grand parking de l'entrée. C'est un changement par rapport au TopoGuide qui nous imposait de tourner à gauche plus haut, entre la piscine et le camping.
À hauteur du parking, nous prenons à gauche un petit sentier.
Ce petit sentier sillonne au creux d'un étroit ravin. Si c'est encore bien boueux au début, ça s'améliore par la suite. Nous sommes au bout du calvaire !
Nous quittons enfin la Forêt Domaniale d'Olhain par le chemin des Blatiers. Celui-ci descend tout droit dans la vallée de la Brette. Le paysage est superbe mais que dire alors en été quand il est ensoleillé !
Nous rentrons dans Rebreuve-Ranchicourt par la rue d'Olhain... Tiens ? Me serais-je égaré ? Non, mon GPS confirme que nous sommes sur le bon chemin...
Rue du Château, le château a été complètement rénové depuis mon passage en 2019. D'ailleurs, le chantier est toujours en cours du côté de la chapelle.
Ce bel édifice du XVIIIè siècle, construit à l'emplacement occupé par un prieuré au XIè siècle, fut la propriété des comtes de Ranchicourt jusqu'en 1747. Il fut alors revendu avec son titre de noblesse à la famille Damiens.
En 1778, on y ajoute le colombier, les écuries et la porte vers le village. À l'époque, on y rentrait par ce qui constitue aujourd'hui la façade arrière.
Pendant la Première Guerre Mondiale, il fut occupé tour à tour par le 30ème Régiment des aérostiers français, par l'Etat-Major de l'Armée Canadienne qui prépara ici l'attaque de Vimy du 9 avril 1917 et enfin, en 1918, par l'Etat-Major de la 1ère Armée Britannique.
Après avoir hébergé un restaurant gastronomique, un complexe touristique y est aujourd'hui en cours d'aménagement.
L'Office du Tourisme de Béthune-Bruay y organise des visites guidées certains dimanches entre avril et octobre.
Ce n'est pas seulement le château que je trouve beau, mais aussi tout le quartier le long de la Brette.
Nous quittons Rebreuve-Ranchicourt par la rue de la Pâturelle. La Pâturelle, c'est d'ailleurs le nom de cette plaine agricole que nous traversons.
En regardant vers la droite, nous pouvons déjà apercevoir l'église Saint-Jean-Baptiste d'Houdain, accrochée au flanc de la colline et, plus loin, le terril n° 10, 3 de Bruay Ouest, à Bruay-la-Buissière.
Au bout de la rue de la Pâturelle, nous tournons à droite sur la Chaussée Brunehaut.
Cette ancienne chaussée romaine (notez que tous les historiens ne sont pas d'accord sur ce point) reliait Arras à Boulogne-sur-Mer et c'est probablement par ici que Sigeric rejoignit Rome en 987. Ah... Mais ça c'est une autre histoire...
En approchant d'Houdain, on voit encore mieux l'église Saint-Jean-Baptiste d'Houdain. Hmmm... Lapalisse en aurait probablement dit autant...
Cette église, détruite aux XIVè et XVè siècles, puis reconstruite et agrandie fin du XVè est remarquable par sa tour carrée (construite en 1894 après que le clocher en bois ait pris feu, frappé par la foudre en 1893) et le chœur et la grande nef qui, pour des raisons de stabilité, ne sont pas alignés.
Une légende est attachée à sa reconstruction : les habitants avaient décidé de rebâtir l'église au pied de la colline pour en faciliter l'accès aux personnes à mobilité réduite (bon, je l'admets, ce terme n'était pas utilisé à l'époque). Mais la nuit, le diable remontait les pierres au sommet de la colline. Dans ces conditions, les travaux s'éternisaient.
Les habitants organisèrent donc une concertation entre Dieu et le diable et un compromis fut trouvé. L'église serait construite au milieu de la pente, là où vous la voyez aujourd'hui !
À Houdain, nous remontons la Chaussée Brunehaut jusqu'à l'ancienne ligne de chemin de fer Bully-Grenay - Brias, à l'angle avec la rue Désiré Haze.
Là, nous nous engageons sur l'ancienne voie ferrée transformée en voie verte que nous suivons pendant 3,3 kilomètres en direction de Bruay-la-Buissière.
Cette ligne à voie unique fut mise en service en 1875. Elle reliait la ligne Arras - Dunkerque au départ de Bully-les-Mines à la ligne Fives - Abbeville près de la gare de Brias. Elle transporte des voyageurs jusqu'en 1958.
Mais depuis sa mise en service elle transporte aussi du charbon. En effet, les Compagnies des mines de Bruay, Nœux et Béthune y ont toutes connecté leurs lignes privées.
En 1990, le transport de fret cesse et la ligne est déclassée en 1991 entre Bruay-les-Alouettes et Brias.
Malgré l'humidité du sol, le parcours est agréable et varié, passant tantôt au-dessus de la Lawe au Pont Fêtu, tantôt sous la Rocade Minière au viaduc de Divion.
À l'arrivée à Bruay-la-Buissière, le balisage du GRP manque... enfin... en tout cas, je ne l'ai pas vu. J'ai donc suivi l'itinéraire prévu par le topo-guide qui nous fait prendre un petit chemin vers la gauche après la station-service de l'Intermarché voisin.
Ce petit chemin aboutit dans la cité n° 33. À cheval sur Divion et Bruay-la-Buissière, ses rues portent toutes le nom d'un musicien, comme la rue Rossini par laquelle nous entrons, ou encore les rues Bizet et Chopin que nous empruntons. D'où son nom de Cité des Musiciens. À moins que ce ne soit l'inverse...
Inscrite depuis le 30 juin 2012 sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, elle hébergeait les familles des mineurs de la fosse n° 5 - 5 bis des mines de Bruay. Cette fosse constituée de deux puits, donc, se trouvait à 500 mètres d'ici, de l'autre côté de la Lawe.
L'extraction y commence en 1898. Le 3 novembre 1914, Raymond Poincaré alors président de la République vient visiter les installations et descendra même au fond.
Le 7 février 1951, une explosion due au grisou se produit à 679 mètres de profondeur, tuant 11 mineurs. Parmi eux se trouvait Henri Grave, mineur délégué à l'hygiène et à la sécurité. Il venait juste d'inscrire dans son carnet "Trop de poussières. Grave danger". Aurait-on pu éviter cette tragédie sachant qu'il signalait ce problème depuis presqu'un mois déjà ?
Le charbon y sera extrait jusqu'en 1969. Aujourd'hui, des installations de la fosse, seul le bâtiment des bains-douches est encore visible.
Nous quittons la cité des Musiciens pour traverser la vallée par le parc de la Lawe. Nous n'en voyons en tout cas qu'une petite partie car ce parc de 30 hectares, qui inclut même un ancien terril, s'étend jusqu'au viaduc de Divion.
À mi-pente de la rue Gaston Blot que nous empruntons pour quitter la vallée de la Lawe, nous découvrons sur la gauche le mémorial du mineur.
Comme beaucoup de gens, sans doute, j'étais convaincu que ce château d'eau surmonté d'une stèle constituait le mémorial. En réalité, il n'en est pas tout à fait ainsi.
La stèle, construite en résine en 1988, fut d'abord installée devant le Musée de la Mine de Bruay-la-Buissière où elle resta pendant trois ans. Puis, craignant qu'elle soit dégradée par vandalisme, elle fut déplacée au-dessus de ce château d'eau. Situation qui ne plaît pas à tout le monde tant elle est peu visible. Alors, quel avenir pour cette stèle ?
Au sommet de la colline, nous bifurquons à gauche dans la rue Paul Eluard en direction de Divion.
Ce n'est pas évident mais nous passons ici entre deux terrils. Car si, à droite, le n° 10, 3 de Bruay Ouest est encore bien visible, à gauche, le n° 1, 5 de Bruay Nord a, lui, été exploité et n'en reste que son assise dissimulée par la végétation.
La rue est un peu tristounette mais elle nous amène à la cité n° 30 à Divion.
Très peu d'informations subsistent sur cette cité des Astres - toutes les rues portent un nom d'astre - dont une grande partie a été détruite. Tout juste ai-je trouvé qu'elle était peuplée majoritairement de Polonais.
Nous ne rentrons pas dans ce qui reste de la cité car, juste avant de l'atteindre, nous prenons à droite dans la rue du Soleil.
Bon, aujourd'hui le soleil est absent sur cette rue désaffectée mais on ne peut y avoir aucun doute quant au fait que nous arpentons les chemins du bassin minier !
De cette rue, nous pouvons effectivement observer le terril n° 10, 3 de Bruay Ouest, le plus proche, les terrils jumeaux du Pays à Part dans la profondeur et, vers la gauche, le terril n° 4, 2 bis d'Auchel Est. Auparavant conique, mesurant alors 80 mètres de haut, ce dernier est en cours d'exploitation.
Le terril n° 10, 3 de Bruay Ouest était un des deux terrils de la Fosse n° 3 - 3 bis - 3 ter des mines de Bruay située tout près d'ici, au nord de la rue Paul Eluard que nous venons d'emprunter.
Le chevalement du 3 ter avait la particularité d'être le seul dans tout le bassin minier à avoir été construit en béton. Celui-ci sera dynamité le 21 février 1975.
La rue de Bruay, à Calonne-Ricouart, est un véritable balcon donnant sur Marles-les-Mines. La vue y est bien plus impressionnante que ce qu'aucune photo ne pourrait donner. Je vous encourage vivement à vous y rendre, d'une façon ou d'une autre. Le mieux étant à pied, bien sûr...
J'y étais déjà passé à l'occasion de mon périple sur la Via Francigena et j'y suis toujours autant impressionné. N'attendez toutefois pas que le terril n° 4, 2 bis d'Auchel Est ait complètement disparu.
À l'horizon à gauche, on aperçoit le terril n° 14, 5 d'Auchel et entre les deux terrils cités on devine l'assise du n° 13, 3 d'Auchel Est. Nous en reparlerons sûrement lors de la prochaine étape.
Dans la descente de la rue du Mont Saint-Eloi, à Calonne-Ricouart, une stèle commémorative m'interpelle. Je la pense relative à un coup de grisou dans une mine mais je suis loin de la réalité !
Le 26 août 1975, en pleine nuit, le terril n° 15, 6 d'Auchel explose, tuant six habitants - 5 à 7 habitants selon les sources - de la cité Quenehem toute proche. Celle-là même où nous nous trouvons !
Plutôt que de longues explications, je vous propose de visionner ci-dessous les archives filmées de l'INA.
Trois cents mètres plus bas, sur la droite de la route, nous sommes interpellés par un chevalement en bois.
Ce belvédère de sept mètres de haut, orienté vers le bassin minier, est un des éléments du jardin du souvenir aménagé à l'emplacement de l'ancienne cité de Quénehem détruite par l'explosion de 1975.
Nous descendons la rue du Mont Saint-Eloi jusqu'au fond de la vallée et nous tournons à droite dans un petit chemin juste avant d'atteindre la Clarence.
Nous quittons la vallée par le parc de l'église Saint-Vaast, à Marles-les-Mines.
En 1536, c'est une chapelle qui est construite à cet emplacement. Le village est alors tout petit et c'est amplement suffisant au regard de la population.
Mais avec l'implantation des mines, le nombre d'habitants croît rapidement et le besoin d'un édifice plus grand se fait sentir. C'est alors que la commune et la fabrique d'église se mettent d'accord sur un nouveau projet. Ainsi, grâce aussi au concours de l'Etat, une nouvelle église dont l'ancienne chapelle constitue le chœur sera livrée au culte en 1869.
Elle se verra encore adjoindre deux tribunes en 1882 pour prendre la forme que nous lui connaissons aujourd'hui.
Puis, c'est rapidement que nous atteignons la Mairie de Marles-les-Mines, point final de l'étape.
Si vous retournez à la gare de Béthune, l'arrêt Amiens du bus Tadao n° 20 se trouve à 200 mètres, en haut du boulevard Léon Gambetta. Il vous ramènera en direct en une cinquantaine de minutes.
Cette deuxième journée sur la boucle 1 des Tours du Bassin minier entre Barlin et Marles-les-Mines est une immersion totale dans l'histoire de ces hommes et ces femmes qui consacrèrent leur vie à une région dont, pour beaucoup, ils n'étaient même pas originaires.
On passe de terril à cavalier minier, de cavalier minier à cité minière, de cité minière à terril sans arrêt... à l'exception de la traversée de la Forêt Domaniale d'Olhain qu'en cette saison on (je) préférerait éviter...
Quoiqu'il en soit, une très belle étape bien dans l'esprit de ces tours du bassin minier Nord - Pas-de-Calais proposés par la FFRP !
Vous souhaitez faire cette randonnée ? Ci-dessous, vous trouverez le fichier GPX tenant compte des modifications de parcours depuis la parution du topo-guide de la FFRP :