23 Juin 2022
C'est peu avant 10 heures que Kévin et moi arrivons dans la zone de départ de l'étape de ce jour, à Vielsalm. Or, il faut le savoir, 10 heures est la limite pour les inscriptions ! Là, c'est sûr, en partant dans les tout derniers, nous risquons bien de ne pas voir grand monde sur le parcours !
Vielsalm s'impose évidemment comme ville-étape de la Marche Européenne du Souvenir et de l'Amitié (MESA) puisque celle-ci fut organisée la première fois en 1967 par le Lieutenant-Colonel Borboux, alors chef de Corps du 3ème Régiment de Chasseurs Ardennais, dont Vielsalm était la ville de garnison.
En suivant l'itinéraire à travers la ville, différents monuments et vestiges nous rappellent que la région fut le théâtre d'âpres combats dans lesquels les Chasseurs Ardennais, notamment, se distinguèrent mais aussi qu'elle fut la dernière portion du territoire belge à être libérée de l'occupation allemande en 1945.
Du centre de Vielsalm, nous nous dirigeons vers le nord-est pour rejoindre et emprunter jusqu'à Petit-Thier la ligne 47A du RAVeL (Réseau Autonome des Voies Lentes).
La ligne de chemin de fer 47A avait été construite par les Allemands durant la Première Guerre Mondiale, de 1914 à 1917. Après la capitulation, elle est exploitée par les chemins de fer belges jusqu'au 10 mai 1940, quand les Allemands envahissent la Belgique pour la seconde fois.
Pour éviter que les Allemands ne l'utilisent, l'armée belge fait sauter le viaduc de Hermanmont construit sur la ligne au nord de Vielsalm. Il ne sera jamais reconstruit, limitant l'usage de la ligne à la desserte de quelques entreprises locales.
Aujourd'hui, le tracé de la ligne est devenu une véloroute qui offre de belles vues sur la vallée. Nous la suivons pendant un peu plus de trois kilomètres.
Nous quittons le RAVeL à l'entrée de Petit-Thier pour traverser le massif du Monti, au nord. Avec des portions à 10, voire 15 %, la sortie de la vallée est rude !
Le superbe chemin, tracé dans le bois sur deux kilomètres et demi, nous fait passer par le sommet, à 569 mètres d'altitude. C'est aussi le point le plus haut de la randonnée.
Nous sortons du massif par la route de Mont-le-Soie en direction de Grand-Halleux. La vue s'ouvre sur la vallée de la Salm.
Nous avançons pendant sept cents mètres jusqu'à un carrefour à six branches. Face au joli poteau indicateur, nous apercevons la croix Jean Giet.
Si la personnalité de Jean Giet reste encore un mystère pour moi, j'en sais un peu plus sur la croix : elle était déjà mentionnée dans un écrit le 16 août 1684... Quoi ? C'est tout ? Ben oui, j'ai juste dit que j'en savais un peu plus, non ?
Nous empruntons alors le chemin de Hourt pour descendre jusque... Hourt, un hameau de Grand-Halleux situé au sud, sur la Salm. Nous bénéficions de beaux points de vue sur la vallée.
Arrivés sur la Salm, je découvre avec stupéfaction que le vrai nom de la Salm est le Glain ! Non non, il n'est pas question d'Alzheimer, là ! Je suis sûr de ne jamais avoir appris ça !
En fait, cela tient d'une erreur d'un cartographe, à la fin du XVIIIè siècle. Du Xè au XVIIIè siècle, la vallée de la Salm était un comté, le comté de Salm. Les habitants ont alors pris l'habitude de parler des eaux de Salm, escamotant petit à petit le vrai nom du cours d'eau, le Glain, donc. C'est ainsi qu'aujourd'hui, on peut voir sur les cartes la dénomination Salm ou Glain le long du même cours d'eau !
Après le passage sur la Salm... enfin... le Glain, nous nous engageons dans la vallée d'un de ses affluents, la Gottale.
À l'entrée de la vallée, nous apercevons une meute d'écoliers descendre de bus avec l'intention de parcourir une portion de l'étape du jour. Nous accélérons le pas pour prendre un peu de distance. Ce n'est pas que nous soyons asociaux, mais bon...
Ce faisant, nous rejoignons un petit groupe de marcheurs dont l'un porte une véritable sono sur le dos ! Ce n'est pas que nous n'aimions pas la musique, mais bon...
Nous voilà ainsi coincés entre les deux groupes. Nous décidons alors de nous arrêter près d'un gué sur la Gottale pour casser la croûte sans attendre la grande halte et ainsi laisser prendre de l'avance à tout ce petit monde...
C'est aussi le moment choisi par un tout nouvel Airbus A400M Atlas de la Défense belge pour venir nous saluer. Le premier des sept exemplaires commandés par la Belgique a été livré le 22 décembre 2020.
Rassasiés, nous sortons du gué, si je puis dire, pour quitter le cours de la Gottale en direction de Farnières...
Le chemin est superbe, l'endroit bucolique.
Au bout du chemin, nous découvrons un endroit absolument fabuleux ! Le Centre de Rencontres et d'Hébergement (CRH) - Domaine de Farnières est un magnifique bâtiment perdu sur un site de 43 hectares au cœur de la nature (regardez la vidéo après mes photos pour en être convaincu).
Le site appartenait au baron Fernand Orban de Xivry qui fit construire le château en 1926. Il n'en profitera jamais puisqu'il trouva la mort pendant les travaux. C'est sa veuve qui en acheva la construction avant d'en faire don en 1929 aux Pères salésiens de Don Bosco.
D'abord école d'horticulture (1935) et d'agriculture (1944), puis centre spirituel (1967), le domaine est aujourd'hui un Centre de Rencontres et d'Hébergement pluraliste géré par des laïcs.
Des Classes citoyennes formant les jeunes à la citoyenneté y sont proposées mais tout un chacun peut aussi y loger pour profiter de la nature et des nombreuses randonnées possibles dans cette splendide région.
Bienvenue au Domaine de Farnières
Dans cette vidéo, nous vous laissons aller à la rêverie en vous imprégnant de l'ambiance du Domaine de Farnières.
Bien qu'une halte soit organisée au château, nous ne nous attardons pas car nous y avons rattrapé monsieur juke-box et nous voulons mettre de la distance pour pouvoir profiter pleinement de la nature.
Et de nature il en est bien question sur les trois kilomètres à travers bois en direction de Rencheux. J'ai déjà bien roulé ma bosse depuis quatre ans que je me suis mis à la randonnée mais je n'ai encore jamais vu de bois aussi majestueux ! C'est tout simplement grandiose !
À mi-parcours, dans les Fonds d'Crawé, avant de franchir le ruisseau de Rencheux, nous avons droit à un petit ravitaillement. Il fait chaud, ce ne sera pas de refus !
La caserne qui abritait jadis le 3ème Régiment de Chasseurs Ardennais domine les Fonds d'Crawé. Aujourd'hui c'est une zone d'activités économiques. La grande halte y est judicieusement organisée.
Évidemment, en y arrivant à 14h30, l'endroit n'est plus fréquenté que par deux ou trois marcheurs attardés. L'heure du casse-croûte est aussi passée, nous n'y boirons qu'un verre...
Nous traversons Rencheux vers le sud puis, à la sortie, nous bifurquons plein ouest pour remonter la vallée du ruisseau de Goronne pendant deux kilomètres et demi. Que la campagne est belle sous le soleil !
En chemin, nous tombons sur un jeune marcheur en train d'agoniser sur le chemin. Oui, bon, j'exagère un peu. C'est juste que le pauvre Tristan a les pieds en compote.
Alors que beaucoup, dans son état, auraient abandonné, il décide courageusement de continuer. Nous décidons de le supporter soutenir indéfectiblement jusqu'à l'arrivée. Il reste douze kilomètres...
Nous dépassons les premières maisons de Goronne avant de tourner franchement à gauche. Le chemin s'élève lentement vers le massif du Thier du Mont, élargissant le panorama.
A la lisière, nous récupérons un deuxième marcheur en souffrance. Nous voici donc investis du rôle de camion-balai.
Nous suivons la lisière du massif vers la droite, en direction de Grand-Sart. D'ici, la vue sur la vallée est imprenable.
À l'extrémité ouest du massif, nous découvrons le mémorial de l'armée clandestine et du 508th Parachute Infantry Regiment.
Le 508ème, une unité américaine créée le 20 octobre 1942, a joué un rôle important lors de la Bataille des Ardennes. On sait néanmoins que l'appui de la résistance belge fut aussi d'un grand secours. Ce mémorial commémore la collaboration entre les deux.
Pour les fans belges de football, il est intéressant de noter que le surnom du 508th Parachute Infantry Regiment est Red Devils.
En prenant la direction de La Comté, nous tournons carrément autour du Thier du Mont. Nous profitons toujours de superbes chemins.
Alors que nous étions descendus pour rejoindre La Comté, au trois-quarts de l'étape, voilà qu'il nous faut tout remonter pour traverser le massif !
Et ce n'est pas juste une petite grimpette ! Pendant près d'un kilomètre, c'est une pente oscillant entre 10 et 15% qui met nos organismes à rude épreuve.
Du sommet, nous bénéficions de magnifiques vues sur la région. Et comme nous sommes au sommet, nous ne pouvons pas monter plus haut ! C'est donc une descente qui nous attend en direction de Rendeux.
Nous débouchons du massif au lieu-dit La Poudrière. Ça va, c'est bon, nous n'avons pas encore explosé !
Nous le pourrions, pourtant, exploser... Car les organisateurs jouent un peu avec nos nerfs ! Alors que nous aurions pu continuer à descendre tranquillement jusqu'à Vielsalm, voilà qu'ils nous font remonter le massif !
Bon, ce ne sera "que" quatre cents mètres, mais quand même...
Nous longeons la lisière nord du Thier du Mont pour finalement redescendre vers la vallée de la Salm.
Le final n'est presque qu'une formalité. Nous suivons à la fois la Salm et la ligne de chemin de fer vers le nord, pour entrer dans Vielsalm par le quartier de la gare.
Nous aurions normalement dû contourner le lac des Doyards par la gauche mais les organisateurs nous invitent à couper au court, par la droite. Oh, ce n'est ni qu'ils soient magnanimes, ni qu'ils aient pitié de nous. Simplement qu'ils démontent les installations de l'arrivée à 18 heures et qu'ils veulent éviter des heures supplémentaires au personnel !
Nous arrivons ainsi au bout de l'effort à 17h50 ! Et quel effort ! N'est-ce pas Tristan ? Bravo en tout cas pour ton courage ! Et à demain pour la dernière étape, au départ d'Houffalize.
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Si vous voulez revivre cette étape en vidéo 3D, c'est ici :
Appréciation du parcours :
Pas besoin de long discours pour dire ô combien cette étape fut magnifique. Bien sûr, nous - enfin... surtout Kévin - avons pesté contre l'asphalte du RAVeL en début d'étape mais quand le paysage en vaut la peine, nous - enfin... surtout moi - sommes prêts à tout pardonner.
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Vous souhaitez parcourir cette étape de la MESA ? Vous trouverez ci-dessous la trace GPX de l'itinéraire tel que je l'ai suivi :